Obstacles

Tout était emballé. Une valise contenait assez de nourriture pour quatre jours, plus une marmite électrique et un chauffe-eau. Le téléphone sonna...

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Debbie Shapiro

Posté sur 06.04.21

Il y a une relation très spéciale entre un 'hassid et son rabbi ; le rabbi montre par ses mots, ses écrits et ses actions le chemin accessible pour fonder une sincère et profonde relation avec le Tout-Puissant. Un 'hassid – en suivant ce chemin – atteint non seulement une relation profonde et durable avec son Créateur, mais également avec son maître spirituel.
 
Voici donc l'histoire de mon premier voyage vers la tombe de notre rabbiRabbi Na'hman – dans la ville de Ouman, en Ukraine. Avant de commencer notre voyage, j'ai demandé à mon mari ce que je devrais faire dès mon arrivée: devrais-je réciter le Tiqoun Klali (les dix chapitres des Psaumes dont la liste nous a été donnée par Rabbi Na'hman), prier avec mes propres mots (hitbodédouth) ou me saisir d'un livre des Psaumes pour en réciter le plus possible. À la suite de ce voyage, j'ai découvert la profondeur et la définition de cette relation.
 
Tout était emballé. Une valise contenait assez de nourriture pour quatre jours, plus une marmite électrique et un chauffe-eau ; il y avait également des pull-overs, des longs dessous, des collants de laine, des moufles, des chapeaux et des pyjamas chauds (l'hiver ukrainien est plutôt rude). Juste avant que notre navette arrive, le téléphone sonna.   
 
Je courus pour prendre le combiné : c'était un de mes enfants qui appelait pour me dire au revoir. 
 
"Maman," me dit mon fils, "lorsqu'on voyage vers un tsadiq, il y a toujours des méni'as (obstacles) qui nous empêchent de mener à bien notre voyage. Ne les laisse surtout pas t'arrêter. Tu dois vraiment vouloir aller là-bas si tu le veux vraiment." 
 
Je ris, "J'ai entendu que cet hiver, il fait très froid à Ouman et qu'ils n'ont pas eu un tel climat depuis la deuxième guerre mondiale! Ils s'attendent à ce que le thermomètre descende jusqu'à moins 20 degrés ce Chabath. C'est un obstacle suffisant pour moi. Je n'ai pas besoin de plus."
 
Après quelques bons voeux, je reposer le combiné pour me précipiter vers ma navette: le conducteur commençait à s'impatienter. Ma fille et moi étions sur notre chemin vers Ouman, la tombe du Rabbi des breslovers: Rabbi Na'hman.
 
Lorsqu'il s'agit de voyager, je suis presque compulsive dans mon organisation. J'ai tendance à vérifier mon sac à main une douzaine de fois afin de m'assurer de manière absolument certaine que je n'ai rien oublié de ma longue liste de nécessités. Cependant, cette fois-ci, j'avais décidé que puisque j'avais vérifié les papiers la veille, il n'était pas utile que je les vérifie de nouveau.
 
Lorsque le gardien de sécurité à l'aéroport me demanda à voir mon passeport, je m'aperçus que j'avais mon passeport israélien périmé avec moi au lieu du valide. 
 
J'appelai immédiatement mon mari, certaine qu'il trouverait mon nouveau passeport quelque part dans la salle à manger. Il vérifia la table – et ses tiroirs – de fond en comble (littéralement) mais ne trouva rien. Il vida les placards, vérifia partout jusque dans la poubelle à recycler. Mon passeport avait disparu.
     
Pendant ce temps, je me rendis au bureau gouvernemental qui se trouvait à l'aéroport afin de demander un laisser passer de transit spécial. On me répondit qu'il en était hors de question. Sans passeport, je ne pouvais pas entrer dans l'avion.
 
Nous avions acheté ces billets plusieurs mois auparavant. Ils étaient extrêmement bon marché – et n'étaient pas transférables. Si je ratais ce vol, il m'était impossible de partir plus tard.
 
Le gardien de sécurité m'autorisa à entrer dans la section d'enregistrement. "Quelques fois," me dit-il, "ils vous laissent voyager avec le passeport américain. Vous pouvez toujours essayer…"
   
C'est ce que je fis. L'employé au comptoir de vérification réalisa immédiatement que si mon passeport américain avait été émis en Israël, j'étais évidemment israélienne. Lorsque je lui expliquais que je n'avais pas la moindre idée où se trouvait mon passeport israélien, elle me référa à son superviseur. Le superviseur de la compagnie aérienne m'envoya au bureau gouvernemental au sous-sol. L'employé du bureau gouvernemental téléphona au superviseur à Jérusalem qui m'expliqua que je ne pouvais pas quitter le pays sans un passeport israélien valide.
 
Ceci était un véritable obstacle ! Mon voyage commençait bien !
 
J'appelai mon mari. Il était entrain de fouiller la maison de fond en comble, mais il n'avait toujours pas trouvé mon passeport. Je vérifiais mon sac à main; ma fille fouilla le sien; nous avions sorti tout ce qu'il y avait dans nos valises afin de vérifier s'il y était. Mais le passeport s'était volatilisé !
 
Je commençais à réaliser qu'il y avait une possibilité éventuelle que je ne puisse pas voyager. Mais ma fille pouvait encore partir. "Malky," dis-je, "tu as un passeport, de la nourriture et une chambre à l'hôtel. Il va y avoir plein d'autres juifs religieux là-bas. Tu pars. Je suis sûre que tout se passera bien pour toi. Prie pour nous deux. Pendant ce temps, je ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour entrer dans l'avion".
   
Mais si Malky partait seule, elle avait besoin de quelqu'un pour l'aider à l'aéroport de Kiev et voyager avec elle de Kiev à Ouman (trois heures d'autobus). Il y avait un couple 'hassid debout derrière nous. Je leur demandais s'ils allaient à Ouman.
 
Ils y allaient.
 
J'expliquais ma situation.
 
Dès que je mentionnais mon nom, nous commençâmes à jouer à l'arbre généalogique juif. Le mari était un bon ami de mon mari. La femme était la belle-fille de mon cousin germain. Une fois que nos identités furent établies, la femme me fit un grand sourire et ajouta avec enthousiasme, "Nous louons un quatre pièces à Ouman. Votre fille peut rester avec nous."
 
Je fus comblée.
 
“Et, en plus,” ajouta-t-elle, “ça sera tellement mieux pour moi. De cette manière j'aurais quelqu'un pour me tenir compagnie.”
 
C'était la première fois qu'ils prenaient des vacances depuis plus de vingt ans de mariage.
 
“Ne vous inquiétez pas, je serais la nouvelle mère de Malky," continua-t-elle, en posant son bras autour des épaules de ma fille.
 
Avec une telle mère, je me demandais si Malky retournerait à la maison.
 
Rapidement Malky et moi arrangèrent de nouveau nos valises. Après une étreinte et un baiser (et un sanglot inévitable) elle s'éloigna, pendant que je restais là.
 
J'appelais de nouveau mon mari; toujours pas de passeport.
 
J'allais vers un nouveau comptoir d'enregistrement. De nouveau, on me dit qu'il fallait obtenir un permis provenant du bureau gouvernemental. De nouveau, l'employé téléphona au bureau principal de Jérusalem. De nouveau, on me dit que je ne pouvais pas partir sans un passeport valide.
 
Je regardais ma montre. L'embarquement devait commencer dans moins de dix minutes; le décollage quant à lui se ferait dans une demi-heure. J'étais perplexe. Je n'y arriverais jamais. Il n'y avait rien – absolument rien – qu'il m'était possible de faire. C'était complètement au-delà de mes capacités.
   
Je décidais de faire une nouvelle tentative, bien que je ne pensais absolument pas que cela ferait une différence. J'attendais mon tour, je priais comme je ne l'avais jamais fait auparavant. "Hachem," priais-je, "c'est un privilège de voyager pour aller vers le tsadiq; s'il Te plait donnes-moi ce privilège. Il n'y a qu'un qui peut m'amener là-bas, et c'est Toi. S'il te plaît, ouvre mon coeur pour que je puisse mériter que Tu m'emportes dans ce voyage spirituel." 
 
La femme devant moi finissait de vérifier son bagage. Je m'approchais de manière nonchalante vers le comptoir, mon coeur battant à cent à l'heure. Je remis mon passeport à l'agent. Je pouvais sentir la sueur couler le long de mon cou. Je criais au plus profond de moi.
 
“Vous préférez l'aile ou la fenêtre ?” demanda l'agent.
 
“L'aile.”
 
L'agent pris mon bagage et me remit ma carte d'embarquement. "L'embarquement a commencé il y a cinq minutes," dit-elle. "Vous feriez mieux de vous dépêcher."
 
J'aurais voulu sauter et brandir mes mains en signe de victoire. Au lieu de cela, je souris poliment et remerciais avant de me dépêcher d'aller vers la section d'embarquement.  
 
Dès que je me trouvais hors de distance d'écoute, j'appelai mon mari. "Commence à dire des psaumes," lui dis-je. "J'ai la carte d'embarquement entre les mains. Maintenant, je dois passer à travers le contrôle des douanes."
  
Je m'arrêtai pour dire quelques chapitres des Psaumes avant d'approcher le gardien.
 
Le gardien regarda mon passeport. "Il n'y a pas de tampon indiquant que vous êtes entrée dans le pays," déclara-t-il. " Pourquoi ?”  
 
“C'est étrange, n'est-ce pas ?” Répliquais-je, essayant de sembler aussi nonchalante que possible. “Quelqu'un m'a dit que j'aurais des problèmes avec ça. Je crois que j'aurais à m'occuper de cela dans les jours prochains."
 
Le gardien ria, estampilla mon passeport et me laissa passer.
 
Je fis quelques pas et m'arrêta pour appeler chez moi. "David," dis-je, en murmurant tout en essayant de ne pas sauter de jubilation, "Encore quelques minutes et je quitte l'aéroport." 
 
“D'accord. Ne t'inquiète pas, je vais préparer un bon plat de pâtes pour toi."
 
“Non. Ce que je veux dire c'est que je quitte l'aéroport pour aller à Ouman.”
 
Silence.
 
Je vérifiai le téléphone pour voir s'il était toujours branché. Il l'était. "Es-tu là ?” demandai-je
 
Toujours pas de réponse.
 
“David ?”
 
“J'ai dû m'asseoir. J'ai failli m'évanouir.”
 
L'avion était bondé. Ma fille et moi-même étions assises à côté d'un chien qui n'arrêta pas d'aboyer pendant tout le voyage (ma fille a peur des chiens). Le taxi que nous avions pris à l'aéroport de Ouman était si froid que l'intérieur des fenêtres était recouvert d'une pellicule de givre.
 
À Ouman, la température était glaciale. Il y avait seulement deux petits radiateurs dans la salle de la synagogue réservée aux femmes; quant à la grande salle – celle réservée aux hommes – elle n'avait même pas d'isolation! Notre marmite électrique se cassa et réchauffer nos plats cuisinés amoureusement à la maison devint impossible. La plupart de nos vivres étaient gelées et immangeables. Le marché était fermé à cause du temps et par conséquent nous n'avions ni fruits ni légumes. Quel régime !  
 
Mais tout cela était sans importance. Ce n'était vraiment pas grave. Nous avions réussi à atteindre le Rabbi ! Nous avons eu le privilège de prier sur la tombe de Rabbi Na'hman ! Nous avons mérité de faire le voyage.
 
Nous avons surmonté les obstacles !

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