L’odeur des reproches – Devarim

Nous constatons que grâce à l'amour que nous portons aux autres juifs, nos remontrances possèdent un aspect positif et réconfortent les personnes à qui nous nous adressons.

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le Rav Shmuel Stern

Posté sur 06.04.21

L'odeur sainte des reproches
 
La paracha Devarim est toujours lue avant le jour de Tich'a be-Av, le jour où nous nous lamentons sur la destruction du Temple de Jérusalem. Dans cette paracha, nous se trouvent les remontrances que Moché Rabbénou a formulées à l'encontre du peuple d'Israël. Moché Rabbénou a reproché aux juifs d'avoir fauté lorsqu'ils se dirigeaient vers la Terre d'Israël en affichant l'absence d'une forte emouna (foi). C'est pour cette raison que le discours de ce passage de la Tora en est un de remontrances envers Israël pour avoir fauté dans leur emouna et avoir retardé leur entrée en Terre sainte.
 
Cette absence d'emouna (foi) envers D-ieu s'était concrétisée à plusieurs occasions, notamment : le péché du veau d'or (Exode 32) ; celui des espions envoyés en Terre d'Israël et qui étaient revenus en déclarant que sa conquête semblait hors de portée (Nombres 13 & 14) ; lorsque le peuple juif s'assembla contre Moché et Aharon pour réclamer de l'eau (Nombres 20) ; lorsque la communauté d'Israël murmura contre Moché et Aharon afin de réclamer de la nourriture (Nombres 16) ; etc. C'est pour cela qu'il est écrit : “Dans cette circonstance, vous n'avez pas cru en l'Eternel, votre D-ieu.” (Deutéronome 1:32). Nous apprenons de cela que le chemin vers la Terre sainte doit se faire essentiellement grâce à la foi. Dans la mesure où les juifs avaient fauté dans leur emouna, qu'ils n'avaient pas cru en D-ieu et en Son serviteur Moché Rabbénou de la façon dont ils auraient dû, ils n'étaient pas entrés en Terre d'Israël.
 
Cependant, toutes les remontrances que Moché Rabbénou a adressées à Israël le furent dans un sentiment d'amour envers le peuple d'Israël. C'est pour cela que Moché Rabbénou était prêt à payer de sa propre personne au nom d'Israël, tel qu'il est dit : “Si Tu voulais pardonner à leur faute ! Sinon, efface-moi du livre que Tu as écrit.” (Exode 32:32). Cela s'explique parce que la caractéristique principale d'une remontrance consiste à mettre du baume au cœur de la personne à laquelle on s'adresse tel qu'il est dit : “Tandis que le Roi (D-ieu) demeure sur Son divan, mon nard (le peuple d'Israël) exhale son arôme. Mon bien-aimé est pour moi un bouquet de myrrhe qui repose en mon sein.” (Cantiques des Cantiques 1:12-13).
 
Ainsi, lorsque Moché Rabbénou adressait ses reproches au peuple d'Israël à propos du péché du veau d'or, cela était fait pour “exhaler son arôme.” C'est parce que l'amour de Moché Rabbénou envers le peuple d'Israël était important qu'il réussit à faire appel au bon qui était en chacun de ses membres (tel que Rabbi Na'hman l'a écrit dans le Liqouté Moharan II, 8). C'est cette attitude qui lui a permis de donner à l'ensemble du peuple d'Israël un sentiment de réconfort.
 
Ce sujet a été abordé à plusieurs reprises dans le Liqouté Moharan. Selon Rabbi Na'hman, le Tsadiq est celui sont le sentiment de compassion est grand et qui ressent un immense amour pour le peuple d'Israël. Le Tsadiq recherche d'une façon continue les bons aspects qui existent en chacun d'entre nous et il prend toujours notre défense lorsque cela est nécessaire.
 
Ce rôle d'avocat du Tsadiq est révélé par la valeur numérique (guématria) du nom de Moché Rabbénou qui équivaut à 345. Cette valeur se situe exactement entre celles des mots hébreux “destruction” (344) et “désirer” (346). Le Tsadiq est celui qui nous éloigne – que D-ieu nous préserve – de notre destruction, à cause de nos fautes et qui nous rapproche du Désir divin, celui qui consiste à remplir la Volonté divine. Ainsi, c'est grâce aux remontrances du Tsadiq qu'un sentiment de réconfort envahit notre âme.
 
Il est écrit dans le livre “'Oneg Chabath ” que Moché Rabbénou commença à exprimer ses remontrances pendant le mois de chevet (janvier-février) qui est le onzième mois de l'année (les mois se comptent à partir du mois de nissan). Le chiffre onze est a mettre en relation avec les onze épices de l'encens appelé “Qetoreth ” qui était brûlé dans l'enceinte du Temple de Jérusalem. Cet encens permettait d'accorder un sentiment de réconfort au peuple juif en expiant leurs fautes. C'est pour cette raison que Moché Rabbénou s'est adressé à Israël pendant le onzième mois de l'année, dans le but de mettre du baume au cœur des enfants d'Israël. Ainsi, c'est grâce à ses remontrances que le peuple juif a pu se renforcer et partir à la conquête de la Terre sainte.
 
De la sorte, nous constatons que grâce à l'amour que nous portons aux autres juifs et à notre volonté de toujours vouloir chercher les bons aspects en chacun d'entre eux, nos remontrances possèdent un aspect positif et réconfortent les personnes à qui nous nous adressons.
 
Tout ceci est encore plus important à réaliser en la période de l'année où nous lisons la paracha Devarim : les jours qui précèdent Ticha'a be-Av­. De fait, pendant cette période, nous devons fournir de grands efforts dans le but de développer un sentiment fort d'amour envers tout le peuple d'Israël. C'est grâce à cette attitude que nous pouvons réparer la destruction du Temple de Jérusalem.
 
Nous savons que le Temple a été détruit à cause du sentiment d'animosité qui régnait à cette époque entre les juifs. Afin de réparer cette terrible faute, nous devons aujourd'hui adapter notre comportement et notre attitude pour tenir compte de la situation dans laquelle nous nous trouvons. Nous devons afficher notre bonne volonté et chercher les bons aspects qu'il est possible de trouver en chaque juif-juive ; nous devons également nous renforcer dans notre emouna (foi) envers D-ieu et nos Sages. Si nous agissons de la sorte, nous pourrons réparer toutes les fautes qui ont causé la destruction du Temple.
 
Dans la même veine, nous devons renforcer notre volonté de rendre des comptes de nos actions ('hichbon nefech). De fait, c'est exactement cela qui doit être l'objectif de toute remontrance : qu'une personne devienne capable de rendre des comptes pour les actions qu'elle a commises et de réfléchir sérieusement aux allusions que D-ieu lui a envoyées à chaque instant.
 
Tout ceci peut être lié à la prière de Tiqoun 'Hatsoth [Pour en savoir plus à propos de la prière de Tiqoun 'Hatsoth, cliquez ici.] Même si cette prière est dite le plus souvent la nuit, pendant la période des trois semaines qui précède le jour de Tiche'a be-Av, nous la prononçons également pendant le jour. Cette période est celle où chaque personne fait son propre 'hichbon nefech : chacun et chacune d'entre nous doit s'accorder du temps pour réfléchir profondément à sa propre personne. Ceci correspond parfaitement à la prière de Tiqoun 'Hatsoth.
 
A ce sujet, Rabbi Nathan de Breslev a écrit : “la prière de Tiqoun 'Hatsoth s'adresse aux spécificités de chaque personne et à la situation particulière dans laquelle celle-ci se trouve. C'est à propos de cela que nous devons pleurer et formuler nos demandes à D-ieu.” C'est également la signification des premiers mots du livre des Lamentations que nous lisons le jour de Tiche'a be-Av. Ces mots font allusion à la ville de Jérusalem, après la destruction du Temple : “Hélas ! (eykha) Comme elle est assise solitaire la cité naguère si populeuse !”
 
Cela signifie que nous devons nous asseoir en solitaire et réfléchir sérieusement à propos de nous-mêmes. En hébreu, le mot “hélas” (eykha) s'écrit avec les mêmes lettres que le mot “où” (a-yeka). C'est le mot qu'a employé D-ieu pour s'adresser à Adam après que celui-ci ait péché en mangeant le fruit défendu. D-ieu lui a demandé : “Où es-tu ?” (Genèse 3:9). Cela nous apprend qu'après avoir fauté, nous devons nous demander “Où nous sommes-nous ?” ; “Où en sommes-nous ?”
 
Il est fait allusion à cette façon de faire dans la paracha Devarim. En hébreu, la racine du mot “DeVaRiM” est la même que le mot “DiBouRiM” (“paroles”) [en hébreu, les lettres “v” et “b” sont interchangeables.] Cela nous apprend que chaque personne doit parler avec son Créateur, particulièrement en s'isolant. Cette prière isolée s'appelle hibodédouth et l'autre prière que nous faisons seuls est Tiqoun 'Hatsoth. C'est à cela que fait référence le verset : “Prenez avec vous des paroles et revenez vers le Seigneur !” (Osée, 14:3). C'est à dire : chaque personne doit prendre des “DeVaRiM” (“choses” en hébreu) qui sont des  “DiBouRiM” (“paroles”) que nous prononçons entre nous et notre Créateur. Et le verset nous informe que c'est grâce à cela que nous pouvons “revenir vers le Seigneur.”
 
L'avantage de ces prières et de nous permettre de développer une réflexion profonde face aux remontrances que nous recevons tous du Ciel. Selon les cas, ces remontrances prennent la forme de pensées, de paroles ou d'actions spécifiques. Cette réflexion que nous menons pendant notre conversation privée avec D-ieu ainsi que l'étude de l'enseignement de Rabbi Na'hman sont des aspects importants de notre Service divin.
 
Selon Rabbi Na'hman, il s'ensuit que les remontrances permettent de mettre du baume sur notre cœur. De plus, grâce à notre bonne volonté et à l'appréciation positive que nous faisons de nous-mêmes et des autres personnes, nous faisons apportons un sentiment de réconfort à nous-mêmes et aux autres. A son tour, cela permettra à la rédemption ultime d'arriver, rapidement et de nos jours. Amen.   

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