Tou Bichevat, la fête des arbres

Cette fête ne serait-elle pas un peu dépassée à l’ère avancée du High-Tech ? L’homme moderne, équipé de son téléphone portable connecté à Internet...

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la rédaction de Breslev Israël

Posté sur 05.04.21

 « L’amandier fleurit et le soleil brille, les oiseaux sur les toits annoncent la venue de la fête… » (Chanson pour enfants très populaire en Israël).

Oui, Tou Bichevat arrive, la fête des arbres. Et pourtant, on a parfois l’impression qu’avec les années, cette fête devient de moins en moins actuelle. L’homme moderne n’est plus dépendant de la nature comme avant. Il vit dans des immeubles protégés et blindés, et les dégâts de la météo ne le perturbent pas le moins du monde. La technologie l’aide à surmonter toutes les limites de la nature. Il triomphe des maladies, améliore son niveau de vie, dépasse les distances et le temps en un instant, et on a l’impression que même le ciel n’est pas une limite pour lui.

Cet homme a-t-il encore de quoi apprendre de la nature, lente et pesante ? Elle qui avance par étapes, en douceur, et ne se précipite nulle part. L’arbre et la fleur ont-ils encore quelque chose à dire à l’homme du High-Tech, armé de son IPhone, de son ordinateur portable et de sa voiture dernier cri ?

La vérité est que, oui, justement. Et cette fête, la fête des arbres et de la nature, est porteuse d’un message des plus importants pour l’homme moderne. Un message qui, s’il ouvre seulement ses oreilles pour l’écouter, influencera sa vie à un point qui dépasse toute reconnaissance. Comment cela ? Eh bien, le progrès, avec toutes les bonnes choses qu’il a apporté à l’homme, lui a aussi causé quelques ravages. L’homme moderne s’est habitué à être paresseux. Point. Tout lui vient facilement.

Avant, s’il fallait un périple de trois jours à dos d’âne pour se rendre à Tel Aviv, aujourd’hui, un « saut » de 50 minutes en voiture suffit. Avant, pour prendre contact avec un ami habitant à l’autre bout du monde, il fallait envoyer une lettre qui prenait, dans le meilleur des cas, deux semaines pour arriver, aujourd’hui il suffit juste d’appeler ou bien d’envoyer un mail. Avant, pour préparer un poulet pour le repas de midi, il fallait l’amener au Sho’het pour l’abattre, puis le déplumer, le saler, le nettoyer etc., etc. Aujourd’hui, on n’a qu’à acheter un poulet tout prêt au supermarché et à le cuisiner. Et si on n’en a pas la force, on peut toujours sortir un plat surgelé et le mettre trente secondes au micro-ondes.

Ce mode de vie habitue l’homme à la paresse. Il reçoit tellement de choses formidables presque sans efforts de sa part, et si quelque chose n’est pas assez à son goût, il se met tout de suite à se plaindre et à se lamenter. Mais il y a plus grave que cela : le manque de patience. Dans le temps, les choses prenaient du temps, il fallait attendre patiemment, en gardant son calme et son sang-froid. De nos jours, tout va si vite, on obtient tout en un clin d’œil. Tout va à la vitesse de la lumière, et l’homme qui a grandi avec la génération des portables, d’Internet, du micro-ondes, souffre d’impatience. Il n’a pas la patience d’attendre plus de trente secondes.

Et que se passe-t-il quand certaines choses prennent plus d’un instant ? Quand il leur faut du temps pour se développer, grandir, se construire ? L’homme moderne a beaucoup de mal avec ces choses-là. Il s’énerve, s’irrite, il est déçu et commence à se plaindre et à accuser. Il a du mal à comprendre que tout ne marche pas au même rythme que le micro-ondes. L’éducation des enfants, par exemple, est quelque chose qui ne se fait pas en un instant. Il s’agit de s’investir pendant des années, d’apporter des soins quotidiens, avec patience et persévérance. Même s’il aurait bien voulu le faire, l’homme moderne ne peut pas mettre son enfant au micro-ondes, tapoter une formule magique et le ressortir, mûr et bien éduqué, au bout de trente secondes. On ne peut rien y faire, ça ne marche tout simplement pas comme ça… Mais il est tellement pressé, il doit s’occuper de sa carrière, il a des projets à lancer, quand aura-il le temps de s’investir dans l’éducation et les soins à apporter à son enfant ?

Les relations entre les gens aussi sont quelque chose qui demande des soins et de l’investissement. Une vie de couple saine, un lien fort entre mari et femme : ça ne se construit pas en un instant. Il faut y investir du temps et des forces mentales. Ecouter, soutenir, encourager, renforcer. Et celui (ou celle) qui n’a pas la force pour tout ça, qui veut des résultats ici et maintenant, aura beaucoup de mal à créer des liens profonds et significatifs avec son/sa conjoint/e, ou avec n’importe qui d’autre (est-ce donc étonnant que les mariages, dans le monde occidental, soient dans une situation aussi catastrophique ?)

La construction de la personnalité et tout ce qui concerne le travail sur les traits de caractère demandent également du temps et de l’investissement. La jalousie, l’orgueil et la cupidité ne disparaissent pas d’un seul coup, et pour voir les autres positivement, pour acquérir un esprit vif, l’humilité, la joie intérieure etc., il faut beaucoup travailler et s’investir.  L’homme moderne aurait-il la patience pour cela ?

Je donnerai, pour finir, encore un dernier exemple qui nous touche plus particulièrement ces derniers temps. La délivrance. Oui, on a appris que « la délivrance d’Israël vient petit à petit ». On nous a raconté que c’est un processus plein de difficultés, d’épreuves et de régressions. Alors pourquoi, quand il s’agit d’agir, nous oublions tout cela ? Après 2000 ans d’exil, nous avons finalement déclaré l’indépendance de notre pays ; convaincus que, ça y est, la délivrance était là. Pourtant, des dizaines d’années sont passées depuis, et les choses ne s’arrangent toujours pas comme on aurait voulu. Le Messie n’est pas encore arrivé et il y a toujours des guerres et des attentats. Il y a des problèmes et des crises, il y a des choses auxquelles il nous faut faire face, tout ne s’est pas réglé en un instant. Et puis les gens commencent à perdre patience. Ils se lamentent, s’énervent, se découragent, trouvent qui accuser. Mais que s’est-il passé ? Quelqu’un avait-il promis qu’en cinq minutes (ou même en cinquante ans), tout s’arrangerait exactement selon les attentes humaines ?

Voilà, nous arrivons à la fête des arbres. Ce n’est pas pour rien que la délivrance est comparée à une plante. « La plante de David, Ton serviteur, fais qu’elle pousse rapidement » – nous disons cela chaque jour dans notre prière. Nous avons beaucoup à apprendre d’une simple petite plante. De la petite graine qui traverse l’épaisseur de la terre et qui se fraye son chemin, lentement mais sûrement, vers le haut. Elle ne travaille pas montre en main, elle n’essaie pas de tout bâcler en un instant et elle n’est pas à se demander en permanence « Que va-t-il se passer ? Quand vais-je enfin finir ? Pourquoi ne remplissent-ils pas leur rôle comme il faut ? » Ce qui l’intéresse, c’est une seule et unique chose : pousser, grandir. Elle avance avec plaisir et avec patience. Etape par étape. Elle perce vers le haut et elle n’abandonne pas. Si une tempête se lève et menace de la déraciner, elle courbe la tête et s’agrippe à ses racines de toutes ses forces, jusqu'à l’accalmie. Elle reçoit avec ardeur chaque goutte de pluie qui tombe sur elle et s’en servira dans un but bien précis : pousser. Sans faire de compte, sans peser le pour et le contre. Calmement et patiemment.

Essayons nous aussi, à Tou Bichevat, de sortir dans la nature, de respirer l’air, de capter les odeurs, d’observer et d’écouter. Observons une petite fleur, touchons doucement ses pétales et écoutons ce qu’elle a à nous apprendre.

Bonne fête de Tou Bichevat !

Traduit de l’hébreu par Carine Illouz

 

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