Une question de temps

Les hassidim du grand Rabbi Aharon de Karlin furent surpris par sa question et discutèrent longtemps sans trouver la réponse. Rabbi Aharon leur demanda : “Quelle est la faute la plus grave dans la Torah ?” Voyant leur confusion, il ajouta : “C’est une faute qui n’est pas écrite dans la Torah !” Après réflexion, ils abandonnèrent et revinrent vers lui, pour entendre une réponse étonnante. La faute la plus grave est qu’un homme passe sa vie sans savoir qu’il a un Père au ciel qui l’aime comme un fils. Cette réponse stupéfia les disciples, mais pour nous, elle semble maintenant évidente.

La certitude qu’HaChem m’aime et que tout ira de mieux en mieux est le fondement de la foi, et cette foi englobe toute la Torah.

Tout repose sur l’amour. Le mauvais penchant ne peut atteindre le cœur de l’homme qu’en lui faisant croire qu’HaChem ne l’aime pas, ou en obscurcissant cette connaissance. Lorsqu’une personne ne se sent pas aimée, elle perd sa motivation et sa volonté de faire le bien. Cela ouvre la porte aux mauvais désirs. Ainsi, quand on voit quelqu’un s’éloigner d’HaChem et tomber dans le péché, il faut comprendre que la racine de tout cela est qu’il ne sait pas qu’HaChem est un Père aimant qui veut son bien.

Tout repose sur la connaissance qu’HaChem m’aime

Lorsque cette connaissance est obscurcie ou absente, elle est la racine de toutes les fautes et de l’éloignement d’HaChem. Le chant qui réveille cette foi profonde chez chaque Juif est le plus grand processus de repentir, car il permet de se repentir de la faute la plus grave de la Torah, d’éliminer sa racine et de commencer à ressentir l’amour d’HaChem. À partir de là, le processus de repentir ne peut que s’améliorer.

Mais la croyance qu’HaChem m’aime et que tout ira bien est le fondement de la foi, nécessite de la patience, comme le dit Rabbi Na’hman : “la lenteur de la colère dépend de la foi”. La foi est la force de la croissance, un processus qui prend du temps et dont les résultats ne sont pas immédiats. La progression se fait selon le principe de “encore mieux, et encore mieux”. Il ne faut pas être impatient, mais croire que les résultats seront toujours meilleurs, jusqu’à la perfection.

De même, lorsqu’on élève des enfants, on ne peut pas s’attendre à ce qu’ils courent en un mois ou terminent le Talmud en deux mois. Cela prend des années, avec un développement constant. Il en va de même pour la rédemption de l’âme, que ce soit des mauvais traits, de la peur ou des souffrances. Plus vous croyez qu’HaChem vous aime et qu’il y a du mieux à venir, plus vous progressez, et chaque jour devient meilleur. Ne vous découragez pas même si les résultats parfaits ne sont pas encore là.

Jusqu’à quand ?

Dans les parachiot précédentes, Israël a vu sept plaies terribles frappant les Égyptiens, et les travaux forcés ont cessé. Pharaon a vu la puissance absolue d’HaChem sur toutes les créatures, et même les magiciens ont reconnu “C’est le doigt d’HaChem.” Pourtant, Pharaon n’a pas libéré les enfants d’Israël, malgré tout le bien d’HaChem. Certains Juifs se sont découragés, voyant que la rédemption complète n’était pas encore arrivée.

Le découragement est exactement l’opposé de la foi. Le traité “Zéraïm” dans les Mishnaot, qui traite de la croissance et du développement, s’appelle “Emouna” (foi), car on ne peut rien faire pousser sans foi, sans patience.

Aujourd’hui, nous savons que chaque plaie avait un but, et que le peuple d’Israël ne pouvait pas sortir de l’esclavage à la liberté jusqu’à la traversée de la mer rouge en un instant mais plutôt dans un processus long de libération spirituelle de l’esclavage et de construction de la foi étape par étape. Et même ce processus qui a duré environ un an, a été considéré comme une sortie précipitée, comme nous l’apprenons dans la paracha de cette semaine, car de tels processus peuvent prendre des années.

Lors de la plaie des ténèbres, de nombreux Juifs moururent. Nos sages expliquent que ceux qui moururent étaient les méchants. Rabbi Na’hman se demande pourquoi des méchants comme Datan et Aviram ont survécu, et y répond : ceux qui moururent étaient ceux qui s’étaient découragés de la rédemption.

Comment est-ce possible, après avoir vu huit plaies incroyables et les avertissements de Moché ? Ceux qui se sont découragés manquaient de patience, comme la Torah le dit : “Ils n’écoutèrent pas Moché à cause de la fatigue.”

Ceux qui n’ont pas de patience ne perçoivent pas la foi et attendent des résultats immédiats, sans voir les progrès du processus de rédemption.

C’est pourquoi ces Juifs malheureux se sont découragés de la foi, et selon les paroles de Rabbi Aharon de Karlin, qui nous a été rapporté – c’est la faute la plus grave. Ainsi, bien qu’il y ait eu de grands méchants, tant qu’ils croyaient qu’HaChem les aimait et qu’il y avait un processus de rédemption, ils méritèrent d’être sauvés car ils avaient de l’espoir. Mais ceux qui se sont découragés ont perdu la foi qu’HaChem les aimait, et c’est là la faute la plus grave, c’est pourquoi ils n’ont pas mérité d’être libérés.

De même, aujourd’hui, nous voyons des choses étonnantes et des changements incroyables dans le peuple d’Israël, des forces puissantes de foi retentissent parmi le peuple juif. Mais il y en a qui veulent voir le Messie ici et maintenant, et veulent voir tout le monde revenir à la complète repentance ici et maintenant.

Tout le monde doit être patient et fortifier sa foi, et comprendre que plus nous verrons seulement le bien, et comment ce bien continue de croître et de se développer, plus nous croirons qu’il n’y aura que du bien et encore mieux – plus le processus de rédemption continuera à progresser, et la rédemption continuera à croître avec encore plus de force, comme il est dit “Fais croître la corne du salut”.

Puissions-nous tous être libérés, ensemble, avec tout Israël, bientôt et de nos jours, Amen.