Croire en la Thora sans question !

Saisi d'un enthousiasme indescriptible, l'individu proclame sa volonté d'accepter tout ce qui est écrit dans la Torah, ce que son esprit saisit et ce qui va au-delà de son entendement

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le Rav David Hanania Pinto

Posté sur 05.04.21

 Commentant le verset: Ceci (zoth) est un statut de la Torah… (Nombres 19:2), Rachi explique que, comme le Satan et les nations peuvent demander à Israël des explications sur ce précepte divin (la vache rousse) et qu'en est la raison, le verset mentionne le terme 'Houkah: c'est un décret que J'ai promulgué et vous n'avez pas le droit d'en débattre.

Le Zohar (III, 179a) pose à cet effet la question: Pourquoi le verset mentionne-t-il: Ceci est un statut de la loi, et plus bas (Nombres 19:14): Ceci est la Torah?

C'est qu'on peut diviser les mitsvoth en deux catégories. Certaines sont saisissables par l'esprit, c'est le cas par exemple de règles régissant toute la société: interdiction de voler, de tuer, etc. D'autres mitsvoth veillent à la santé du corps humain: de quoi il faut s'abstenir de manger, repos du Chabath, etc. La deuxième catégorie est celle des mitsvoth dont l'esprit humain ne peut pas saisir le sens et sont la source de nombreuses questions. C'est le cas par exemple de la vache rousse, l'esprit ne peut pas concevoir pourquoi ce sont précisément ses cendres, et non d'autres, qui ont la vertu de purifier. Pourquoi d'autre part, choisir une vache de cette couleur et qui n'a pas encore porté le joug: le sens de tous ces détails est caché de l'homme, et même le Roi Salomon, qui était le plus sage des hommes (Rois I, 5:11) avoua à ce sujet: Mais la sagesse s'est tenue loin de moi (Ecclésiaste 7:23; voir aussi Yoma 14a; Nidah 9a). Seule l'âme, partie intégrale de la divinité inhérente à l'homme, est en mesure de comprendre proportionnellement à la grandeur de sa source et à quel degré elle y est attachée.

Bil'am, le mécréant, apprenait aux nations les préceptes de la Torah et leur signification. Les nations aspiraient avec ardeur à les mettre en pratique, mais quand elles sont arrivées au commandement de la vache rousse et n'en ont pas saisi l'essence, elles ont commencé à la tourner en dérision et fini par renier toute la Torah. Elles considéraient qu'on ne peut croire qu'en ce que l'esprit peut saisir… C'est le sens de: Ceci est un statut de la Torah. Seul celui qui croit aux phénomènes que l'esprit ne peut saisir est considéré comme quelqu'un qui croit à la Torah.

Le Zohar (I, 93b, 210a, 288a) dénomme la Providence Divine zoth: là où les Juifs accomplissent les mitsvoth d'une façon désintéressée, la Providence les sauve à leur moment de détresse (Tikouné Zohar 18:35). On la trouve précisément dans le cas où l'on accomplit les préceptes divins sans en comprendre le sens, où on se dévoue corps et âme pour eux. La Chékhinah se trouve ainsi dans les mitsvoth qui sont des statuts ('houkah). D'ailleurs les premières lettres de Zoth 'Houkath HaTorah, ont (plus 1 pour le Collel) la même valeur numérique (21) que EHYeH: l'Eternel est plus prêt à aider celui qui accomplit les mitsvoth dont on ne peut pas comprendre le sens.

Car c'est précisément dans cette catégorie de mitsvoth qu'on trouve la Divinité… Ces préceptes ont un sens mais sont au-delà de notre entendement et leur compréhension pourrait peut-être nous nuire. C'est donc pour le bien de l'homme que Dieu n'a pas donné la signification d'un certain nombre de commandements divins. En effet, l'homme ne peut pas supporter la Lumière Infinie qu'ils contiennent. Comme nous l'avons vu, la Torah et les mitsvoth ont été données à l'homme pour qu'il vive; elles ne visent naturellement pas à le tuer, à Dieu ne plaise.
C'est pourquoi les nations du monde ont porté leur controverse précisément sur la vache rousse, et non sur d'autres préceptes dont nous ne percevons pas la signification. Ceci provient des forces du mal qui ressentent la sainteté de cette mitsvah et qui la tournent en dérision. Le Zohar (III, 189a; 195a) enseigne à cet effet que les forces du mal imitent la sainteté comme le singe imite l'homme, et plus la chose est sainte plus les forces de l'autre côté s'intensifient, comme nous l'ont enseigné nos Sages (Soucah 52a): plus grand est l'homme plus grand est son mauvais penchant. Il doit donc s'efforcer de s'élever encore plus pour le maîtriser.

Les premières lettres de Parah Adoumah forment APh qui signifie par extension colère, irritation ('HaRoN APh). Comme on le sait, chaque nation a un ange représentatif d'où elle puise ses forces (Zohar II, 17a). Ces anges, ajoute le Zohar (III, 265b), sont comme des esclaves qui se nourrissent de restes et s'irritent contre la mitsvah de la vache rousse qui purifie les impurs. Elle les empêche ainsi de subsister (eux qui ne vivent que grâce à l'impureté)… Car si tous ceux qui sont impurs sont purifiés, ils n'auront plus rien à faire dans ce monde.

Suite à Son courroux contre les enfants d'Israël qui ont commis le péché du veau d'or, le Saint, béni soit-Il, leur a donné la mitsvah de la vache rousse qui expie. Le Midrach (Bamidbar Rabah 19:4; 'Houkath 8) rapporte l'allégorie suivante: le fils de la servante ayant sali le palais royal, le roi ordonna à la mère de le nettoyer. Ainsi, Dieu dit: que vienne la mère, la vache rousse, et expie la faute du veau d'or.

On peut en fait se poser la question: Pourquoi Dieu a ordonné la combustion de la vache rousse, la mère du veau? Le Saint, béni soit-Il, ne paie-t-Il pas mesure pour mesure (Chabath 105 b; Nédarim 32a)? La faute des enfants d'Israël doit donc être expiée par le veau, et non par sa mère.

C'est que Dieu vise à tromper les nations du monde et leur montre qu'Il a pardonné à son peuple le péché du veau d'or, à tel point qu'Il a ordonné de ne pas le brûler (mais il le réduit en poussière). Il a aussi agi de la sorte pour que les enfants d'Israël ne s'en souviennent pas et n'en arrivent au désarroi total et négligent ainsi le service divin, à Dieu ne plaise. S'ils deviennent impurs c'est certes à cause du péché du veau d'or, car comme nous l'avons vu, leur souillure a toutefois disparu au moment du Don de la Torah, mais elle a resurgi de nouveau après ce grave péché. C'est que la mère, qui est la Providence Divine (Zohar III, 296a; Tikouné Zohar 21:45) doit nettoyer les saletés de ses fils, que sont les péchés des enfants d'Israël, pour qu'ils n'en arrivent pas au désespoir.

Avant la fête de Pessa'h, les enfants d'Israël ont reçu l'ordre de se procurer un agneau par famille paternelle (Exode 12:3). Ils ont reçu cette mitsvah parce que les Égyptiens et les enfants d'Israël, quand ils étaient asservis en Égypte, adoraient cet animal (Chemoth Rabah 16:3; Tan'houma Ba'alotékha 8). Ils devaient donc se débarrasser de ce grave péché. L'égorgement du veau leur rappelait certes leurs méfaits, mais ne les a pas conduits au désespoir, car ils n'avaient pas encore reçu la Torah… Cet acte les remplissait au contraire de joie, parce qu'ils ont transformé le mal en bien, leurs péchés en mérites (Yoma 86b). En revanche, dans le cas du veau d'or, Dieu ne voulait pas qu'ils s'en souviennent, car cela les aurait conduits au désespoir. Dieu ne voulait pas qu'ils se rappellent comment, quarante jours seulement après qu'ils aient reçu la Torah, ils en sont arrivés à une telle catastrophe. Comme le désespoir est dévastateur, le Saint, béni soit-Il, n'a pas commandé aux enfants d'Israël d'égorger le veau d'or… Ils auraient dû normalement le brûler, car la rectification aurait dû être proportionnelle à la faute commise.

D'autre part, en égorgeant la mère (la vache rousse), les enfants d'Israël ont amené les nations à les tourner en dérision (aspect de courroux que nous avons vu plus haut). Ce qui amènent les Juifs à croire encore plus à la véracité de la Torah, car si la Torah n'était pas douce, sainte et vraie, les nations du monde ne s'en seraient pas moquées et n'auraient sûrement pas ridiculisé cette mitsvah particulière. Et si ce précepte les dérange tellement, c'est parce qu'il leur fait regretter pourquoi elles n'ont pas reçu la Torah. Cette mitsvah est donc tellement sainte qu'elle est insaisissable par l'esprit humain.

Le fait même que les enfants d'Israël ne se posent pas de questions sur cette mitsvah est considéré en lui-même une mitsvah car, comme l'enseigne le Talmud (Sanhédrine 110a): il est interdit de se poser des questions sur la Chékhinah. Au moment où on lève le Rouleau de la Torah, les fidèles sont saisis d'un sentiment des crainte mêlé de révérence profonde quand l'officiant montre le passage de la sidrah qu'il va lire en proclamant: Voici la Torah… (Choul'han Aroukh, Ora'h 'Haïm, 134:2). Ce sentiment est créé par la maîtrise de l'âme sur le corps. Le vav de vézoth unit le corps à l'âme, qui ressentent une ferveur telle qu'on ne discerne plus ce que l'esprit peut saisir et ce qui va au-delà de l'entendement humain. Le Zohar (II, 42a; Tikouné Zohar 13:23b) enseigne à cet effet que le vav est le corps, et la tête le siège de l'âme. Le secret de son image [celle du vav] est connu de certains: il fait allusion à la ligne médiane qui reçoit de Kéther (la Couronne supérieure) à laquelle fait allusion le petit trait vertical qui termine le dessus de la lettre et qui affecte la partie inférieure un canal mince qui devient fin à son extrémité pour finir par disparaître écrit à cet effet l'auteur du Lévouche (dans son livre sur l'Aleph Beth).

Saisi d'un enthousiasme indescriptible, l'individu proclame sa volonté d'accepter tout ce qui est écrit dans la Torah, ce que son esprit saisit et ce qui va au-delà de son entendement. Bien que ce soit seule l'âme qui comprend, il aspire avec ardeur à accomplir tout ce qu'elle contient. Cet enthousiasme se refroidit toutefois quelque temps après, et quand il s'engage dans l'étude de la Torah, il rencontre une mitsvah ou une autre dont il ignore la signification, il est susceptible de commencer à se poser des questions et d'entretenir des doutes, à Dieu ne plaise. Comme l'enthousiasme s'est attiédi, la Torah l'avertit: Ceci est un statut de la Torah: il t'est interdit d'en débattre, de te poser des questions.

Pourquoi le verset stipule-t-il: Ceci est le statut de la Torah, et non le statut de la vache (rousse)? demande à cet effet l'auteur de No'am Elimélekh. Pourquoi ne mentionnerait-il pas aussi Ceci est le statut de l'impureté par exemple? C'est qu'à cause de ce précepte, dont le sens est ignoré de tous, on court le risque de se poser des questions, d'entretenir des doutes. La Torah avertit donc que si on entre dans cette catégorie, on porte atteinte à toute la Torah. En effet, les commandements ne nécessitent pas d'explication; on n'a pas besoin d'en connaître le sens, car ils sont droits; ils réjouissent le cœur… Les jugements de l'Eternel sont parfaits tous ensemble, plus désirables que l'or fin, plus doux que le miel, que le suc des rayons (Psaumes 19:9-11). Celui qui s'engage dans l'étude de la Torah y trouvera tout ce qu'il désire, même s'il n'en pénètre pas le sens profond.

Ce sont les secrets de la Torah et de sa pureté qui servent à contrecarrer l'opinion des nations qui nous tournent en dérision; c'est grâce à cette catégorie de commandements divins que nous subsistons et réussissons dans nos entreprises; c'est grâce à la Torah que nous nous élevons constamment au plan spirituel. De toute manière, même les préceptes divins dont nous percevons le sens, nous devons les accomplir non pas parce qu'ils nous semblent logiques, non pas parce que notre esprit en saisit le sens. Nous devons les considérer comme des décrets divins et les accomplir pour nous conformer à la volonté divine.

La femme en menstrues doit compter sept jours; après quoi elle sera pure (Lévitique 16:28). Elle doit s'immerger dans le mikvéh d'eau avant de pouvoir cohabiter avec son époux. Pourquoi cette eau doit être l'eau de pluie? Le vrai sens profond de cette mitsvah nous est caché. Cependant lors de l'immersion, elle se dépouille de toute entité physique: en effet, on ne peut pas subsister sans respirer. Quand elle sort du mikvéh, elle ressemble à une créature qui vient de naître, pure et immaculée. Elle agit de la sorte pour se préparer à la naissance d'une autre créature, qui est elle aussi entourée d'eau dans le ventre maternel… Ces concepts posent toutefois de nombreuses questions, mais la réponse est unique: C'est un décret que J'ai promulgué, un statut que J'ai légiféré et tu n'as pas le droit d'en débattre.

Goûtez et voyez que l'Eternel est bon (Psaumes 34:9). Si le Saint, béni soit-Il, nous a donné des mitsvoth dont nous ignorons le sens, c'est pour fortifier notre foi en Lui. Celui qui se conforme à la volonté de son Créateur et accomplit les mitsvoth dont il peut saisir la signification parce que Dieu l'a ordonné, ne se posera jamais de questions sur celles dont il ne comprend pas le sens. Inversement, celui qui entretient des doutes sur les préceptes divins qui lui semblent dépourvus de sens est susceptible d'en faire de même pour ceux dont il connaît le sens: il ne les accomplit que parce qu'il les saisit par son esprit, et non pour obéir au Saint, béni soit-Il.

Nous devons éduquer nos enfants et les habituer à accomplir des mitsvoth dès leur plus jeune âge. Ils ne posent pas alors de questions sur leur signification, mais se conforment à notre volonté sans hésitation, qu'il s'agisse de mitsvoth logiques ou de statuts. Mais si nous ne commençons à les éduquer qu'à un âge avancé, ils sont susceptibles de poser des questions et d'aspirer à approfondir la signification des mitsvoth. Et s'il leur arrive de ne pas comprendre nos réponses à leurs questions, ils courent le risque de négliger même les mitsvoth qui ont un sens. Ceci est le statut de la Torah: apprenons à nos enfants que la Torah est un statut: un décret divin.
 
 

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