Une vie royale

Cette semaine, ma famille a subi une grosse perte. La mère de ma belle-fille, Malka Sharabani, est décédée après une maladie de quatre ans.

Elle avait soixante-trois ans, ce qui semble assez vieux pour mourir quand on a vingt ans, mais pas du tout quand on a à peu près le même âge. J'ai le même âge.

Nous savions que Malka, que sa mémoire soit bénie, approchait de la fin mais j'ai constaté que les gens ne sont jamais vraiment prêts pour le choc de la mort. C'est trop définitif et trop effrayant.

Qui n'a pas peur du jour du jugement ? Si vous n'avez pas peur c’est que vous êtes soit un ange  ou vous souffrez d'une forme d'illusion.

Mon petit-fils de trois ans m'a dit: «Ma Savta (grand-mère) s'est couchée dans le lit et est décédée. Ils ont mis son corps dans le sol. »Son grand frère et sa sœur gloussèrent nerveusement et continuèrent à colorier, pressant fortement sur les crayons, dépassant les limites.

Comment leurs petits esprits peuvent-ils comprendre la mort, me demandais-je? Ce n’est pas que j’en sache beaucoup plus qu'eux; un peu  mais pas beaucoup plus.

Je me souviens quand ma propre mère était morte. Tout ce que je voulais, c'était un télégramme du ciel, juste quelques mots me disant qu'elle allait bien. C'est marrant. Aujourd'hui, nous avons toutes sortes de façons de communiquer. Mais il n'y a pas d'application pour l'au-delà. Rien ne peut briser cette barrière sonore entre ce monde et l’autre

Parfois, si nous avons de la chance, Hachem nous bénit et nous faisons un rêve dans lequel nous voyons des parents qui ont déménagé de l'autre côté. Ces rêves sont un cadeau mais vous ne pouvez pas compter sur eux.

Rabbanit Sharabani était une personne adorable. Chaleureuse, royale et très spirituelle, c'était un honneur de la connaître. Elle ne semblait jamais être pressée et était toujours très gracieuse.

Malka a été élevée dans une maison religieuse prospère en Iran. Elle était belle et  avait une forte personnalité.

Le dixième enfant de Malka était un garçon nommé Elhanan.c’était un bébé adorable fougueux, brillant et bruyant. Quand Elhanan a eu  presque deux ans, il a soudainement développé une très forte fièvre. Il a été transporté aux urgences et son cerveau a gravement été endommagé, quelques semaines plus tard, .El’hanan ne parle plus  et bien qu'il puisse marcher, il est extrêmement limité dans ce qu'il peut faire.

El’hanan fréquente une école spéciale tous les jours mais chaque après-midi il rentre à la maison chez Malka. Pendant vingt ans, elle seule a pris soin de son fils. Aussi difficile que cela puisse être, elle a refusé de le mettre quelque part. Elle a dit qu'il était saint, et était une protection spirituelle pour leur famille. Elle avait aussi peur qu’il soit  maltraité ou délaissé et qu’il ne puisse pas  le dire.

elle prenait soin de lui physiquement, mais  combien de force et d'emouna il fallait tous les jours … son plus jeune enfant était passé de complètement sain à cet enfant, qui bougeait à peine. Pourquoi?

C'est une situation aussi mystérieuse que la vie elle-même. Et pourtant Malka est parvenue à rester reconnaissante, spirituelle et calme.

L'année dernière, alors que Malka devenait plus faible, la famille devait s’occuper  davantage d'El’hanan. Ils devaient le prendre les après-midi et souvent le  Chabbath pour que Rav Sharabani puisse être avec sa femme à l'hôpital.

Mon fils Binyamin, qui travaille avec des enfants issus de familles en difficultés, était heureux d'aider même si c'était difficile. Il est doux plein de patience et un grand sens de l'humour, et Elhhanan semble toujours heureux d'être avec lui. Cela réconfortait et apaisait  Malka. J'étais fier que Binyamin soit prêt à prendre soin de son beau-frère de manière si intense. La compassion de mon propre fils m'a fait me sentir petite.

Maintenant que Malka est partie, il y a beaucoup à faire, et évidemment, s'occuper d'El’hanan est une priorité.

Les Sharabani ont essayé d'embaucher un travailleur étranger, mais tout celui qui rencontre Elchanan se sent vite dépassé. Nous devrons voir la volonté d’Hachem tout le temps.

La dernière fois que j'ai vu Malka, c'était quelques mois avant son décès, à la fête de fin d’année de notre petite-fille. En dépit de sa faiblesse, Malka était là, habillée maquillée à la perfection, et portait un chapeau élégant.

Je ne pouvais pas rester longtemps à la fête et après vingt minutes j'ai dit au revoir à ma petite-fille et me suis faufilée vers la sortie

Soudain, j'ai entendu qu’on m’appelait. Je me retournai et vis Malka se dépêcher vers moi du mieux qu'elle put. Je suis allée à sa rencontre. Elle m'a pris les mains. – Yehudit,  me dit-elle, je veux que tu saches combien j'aime Binyamin. Il a un immense bon coeur plein de gentillesse. Il rend Tirtza très heureuse Je veux que tu saches que je l'aime beaucoup. Personne n’égale  Binyamin. "

Pendant que Malka parlait, j'avais les larmes aux yeux. Je savais pourquoi elle me disait cela. Binyamin et Tirtza étaient tombés amoureux grâce à El’hanan. Chaque matin, Tirtza se tenait avec El’hanan dans la rue, attendant le bus pour les enfants handicapés. Binyamin avait l'habitude de s'arrêter et de discuter avec elle sur le chemin de la yeshiva, pendant qu'elle et son frère attendaient la camionnette. Les parents de Tirtza n'étaient pas ravis. Étant issus d'une lignée bien connue de rabbins sépharades, les Sharabani ont une culture ancienne, des coutumes uniques et tout un réseau d'amis et de parents. Mon fils, aussi gentil qu'il était, n'était pas ce qu'ils espérait pour leur fille. Nos deux familles ne correspondaient tout simplement pas. Pourtant, Tirtza insistait elle voulait Benyamin. Elle est sortie une fois avec quelqu'un d'autre mais son choix était déjà fait. Elle a arrêté de manger et devenait déprimée . Finalement, ses parents ont dû cédé; Binyamin et Tirtza se marièrent peu de temps après. Dix ans plus tard, Malka voulait que je sache (même si je le savais déjà) que son mari et elle  appréciaient  mon fils. Il était important pour elle de me le faire savoir pour de bonnes relations entre nous.. Quand je me souviens de ses derniers mots, les larmes me montent. Elle s’appelait  Malka, ce qui signifie Reine, et c'est ce qu'elle était – une âme royale qui m'a accordé un adieu très précieux.

Reebenzen Yehudit Channen est un thérapeute certifié Emuna pour Breslev Israël. Vous pouvez prendre rendez-vous avec elle en contactant staff@breslev.co.il