Penser au monde futur

Beaucoup posent la question aussi sur la Shoa : pourquoi HaChem a-t-Il agi ainsi envers de nombreuses communautés saintes, où des milliers de Justes et de Saints authentiques...

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le Rav Shalom Arush

Posté sur 06.04.21

Rendre le dépôt
 
Rabbi Méïr Baal HaNes perdit ses deux fils le jour du Chabath. Sa femme, Brouria, garda le secret pour elle et à la clôture du Chabath, elle lui divulgua que le temps était venu de rendre le dépôt qui leur avait été remis : leurs deux chers enfants.
 
Cette anecdote est rapportée de la façon suivante dans le Midrach (Proverbes 31) : “Un jour de Chabath, Rabbi Méïr Baal HaNes se trouvait dans la salle d’études, et ignorait que ses deux fils n’étaient plus de ce monde. Sa femme, Brouria, les avait montés au grenier et recouverts d’un drap. Lorsque Rabbi Méïr revint à la clôture du Chabath, il demanda où étaient ses deux fils. Au lieu d’une réponse claire, Brouria attendit la cérémonie de la clôture du Chabath (Havdala) et le quatrième repas (Melavé Malka). Ensuite, elle lui dit : “Rabbi, j’ai une question à te poser”. Il lui répondit : “Demande, ma fille,”. Elle interrogea : “Si un homme a déposé chez moi un dépôt et qu’il veuille le reprendre, que dois-je faire ?”. Rabbi Méïr lui répondit : “Ma fille, celui qui détient un dépôt doit le rendre à son propriétaire”.
 
Elle le prit par la main, le conduisit au grenier et lui montra ses deux fils, gisants morts. Rabbi Méïr se mit à pleurer sur eux. Elle lui dit : “Ne m’as-tu pas répondu que celui qui détient un dépôt doit le rendre ?”. Il s’arrêta immédiatement de pleurer et cita ce verset (Job 1 : 21) : “HaChem donne et HaChem reprend. Béni soit-Il”. Rabbi ‘Hanina dit qu’ainsi il se consola et se calma. Cette histoire illustre cet autre verset : “Qui trouvera une femme vaillante ?” (Proverbes).
 
Rabbi Yo’hanan, qui perdit ses dix fils, consolait les endeuillés en leur montrant la dent de son dixième fils et en leur disant (traité Berakhoth, 5) : “C’est la dent de mon dixième fils qui est mort. Voyez, j’ai perdu dix fils et je garde le sourire et je suis heureux, car j’ai compris que ce monde-ci n’est pas l’essentiel. Leurs âmes ont terminé leur réparation et leur mission dans ce monde. Il n’y a aucune raison d’être triste. Ils jouissent maintenant du monde qui est entièrement bon, tandis que nous devons encore peiner dans ce bas monde pour achever notre mission”.
 
Rabbi Na’hman de Breslev a perdu ses deux fils et la femme de sa jeunesse. Lui-même a disparu à l’âge de 38 ans.
 
Nombreux sont les Justes qui ont dû traverser de telles épreuves, même si tous savaient qu’ils étaient justes et saints. La mort est notre héritage commun, et comme nos Sages de mémoire bénie nous l’enseignent : si Moché est mort, qui ne mourra pas ?
 
Lorsque nous voyons ou apprenons qu’un jeune homme a disparu, nous sommes secoués par la réalité de la mort, alors que nous devrions être choqués lorsqu’un vieillard disparaît. En effet, la perte d’un jeune homme n’est qu’une exception à la règle et chacun peut penser “Cela ne m’arrivera pas”. Tandis que la mort d’un vieillard confirme indubitablement que c’est la fin de tout homme, que nul n’y échappe, que l’on doit rester éveillés et ne pas s’endormir dans ce monde-ci.
 
Ne pas oublier le monde futur
 
Parfois, un homme qui commence à se repentir peut être ébranlé par un revers de fortune. Il s’interroge alors : “Pourquoi cela arrive-t-il alors que je commence à respecter le Chabath, que je me renforce dans la Tora et dans les mitswoth ? Est-ce la Tora et son salaire ?”
 
Si quelqu’un vient de s’engager dans la voie de la Tora et qu’il lui arrive un malheur, on peut demander : “Comment est-ce possible ? Il se fortifie dans l’accomplissement des mitswoth, et il devrait jouir de la longévité et ne pas mourir subitement !”.
 
Beaucoup posent la question aussi sur la Shoa : pourquoi HaChem a-t-Il agi ainsi envers de nombreuses communautés saintes, où des milliers de Justes et de Saints authentiques étudiaient la Tora et accomplissaient les commandements ?”
 
Les gens oublient que ce monde-ci n’est pas essentiel et que l’homme y vient en mission. Il est donc difficile pour eux de comprendre. Mais s’ils se souvenaient qu’il existe un monde futur et que l’homme vient dans ce monde pour se corriger, toutes leurs difficultés disparaîtraient.
 
L’homme est un être mortel
 
L’homme ignore ce qu’il est venu réparer et parfaire dans ce monde. Il ignore aussi quand se terminera sa réparation. Il ne sait pas comment il quittera ce monde. Il doit donc méditer sur le jour de sa mort, comme le dit le roi Chlomo, que son âme repose en paix (Ecclésiaste 7 : 2) : “Il est préférable de se rendre dans une maison endeuillée plutôt que dans une maison où l’on festoie, là-bas est vue la fin de tout homme. Les vivants doivent le prendre à cœur”.
 
On comprend apparemment d’après les propos de l’Ecclésiaste, qu’il est salutaire pour l’homme de se rendre dans une maison de deuil afin de méditer sur sa fin et de comprendre que lui aussi devra en arriver là. Pourtant, tout au long de leur vie, les gens sont témoins de multiples décès, suivent de nombreuses funérailles, sans pourtant s’éveiller sur leur propre fin et leur finalité dans ce monde. Même les médecins et les infirmières qui voient défiler devant leurs yeux nombre de malades incurables et d’agonisants et sont témoins de beaucoup de décès durant leur vie, ne s’éveillent pas du tout et certains restent au contraire plus encrassés dans leur ignorance que le commun des mortels. Même les employés des pompes funèbres, qui enterrent des dizaines et des centaines de cadavres, subissent aussi les vanités du temps sans se soucier de leur destination et de leur fin.
 
C’est pourquoi la fin du verset est justifiée : “Les vivants doivent prendre cela à cœur”. Il ne suffit pas de se rendre à la maison endeuillée, mais il est nécessaire que le vivant fasse attention à la mort. Il doit se dire explicitement : “Moi aussi, je mourrai ! Pour moi aussi on respectera une semaine de deuil !”. Mais tant qu’il ne pense pas ainsi, il ne peut s’éveiller et prendre conscience, bien qu’il se rende dans toutes les maisons endeuillées du monde. C’est la raison pour laquelle l’Ecclésiaste déclare que le vivant doit prendre cela à cœur, qu’il est tenu de se secouer et de méditer sur le jour de sa mort, non par peur, mais pour voir ce monde avec un regard réaliste. Il doit s’interroger : quelle est mon rôle dans ce monde puisque je suis destiné à mourir ? Même si je réussis dans la vie, à la fin je mourrai ! Quelle chose significative puis-je faire dans ce monde ? De cette façon, il arrivera à la conclusion inévitable que le monde possède un Créateur. Il Lui parlera et Lui demandera qu’Il lui montre pourquoi il est né et quelle est sa mission personnelle dans ce monde-ci.
 
L’hôte de passage
 
Dès que l’homme se souvient du jour de sa mort, tout le mensonge de ce monde disparaît et rien ne peut plus le duper ! L’homme qui sait qu’il va mourir ne s’investit plus dans ce monde. De plus, il n’est plus prêt à gaspiller la chose la plus précieuse ici bas, le temps ! Il ignore le temps qui lui est imparti et même s’il prolonge sa vie, ses jours disparaîtront subitement. Il réfléchit donc très sérieusement à investir son temps et les forces dont il dispose. Il est certain qu’il ne se consacrera pas à ce monde-ci, temporel et passager.
 
Tant que l’homme se rapproche du but assigné, il jouit de chaque instant de la confirmation du but et n’accorde aucun prix aux vanités de ce monde. Peu importe le lit sur lequel il dort et à quelle table il mange, il ne cherche qu’à profiter de chaque instant pour la connaissance du Créateur, béni soit-Il, car tel est son but.
 
Les gens qui s’investissent totalement dans ce monde, souffrent de toute chose qui les contrarie et ils peinent beaucoup afin de réussir dans ce monde. Ils ne connaissent pas de répit. Ils courent pendant toute leur vie et se dépensent sans compter pour atteindre le confort et une situation idéale. Beaucoup s’acharnent toute leur vie en vain. Quant à ceux qui parviennent au confort dans ce monde et, comme si c’était possible, “à se faire une place au soleil”, ils n’échappent pas à l’appel du Ciel et doivent abandonner non seulement leurs conquêtes matérielles mais aussi les honneurs et la situation gagnés aux prix de grands efforts. Tout reste dans ce monde, qu’ils abandonnent, démunis de tout.
 
Par conséquent, l’homme qui se consacre à ce monde-ci est doublement perdant : il perd ce monde car sa vie n’est pas vivable, et bien entendu il perd le monde futur. En revanche, celui qui consacre sa vie au véritable but gagne doublement : non seulement le monde futur, mais aussi ce monde-ci, car les gens qui consacrent leur vie, leurs forces et leur énergie pour atteindre ce but, vivent dans le calme, le bonheur et la félicité et ils ne manquent de rien, même dans ce monde-ci.
 
À suivre…

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