Vivre sa foi

Vivre D-ieu, c'est vouloir nous rapprocher de Lui, chaque fois que cela est possible. C'est également réduire à sa plus simple expression la différence entre la synagogue et notre environnement.

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David-Yits'haq Trauttman

Posté sur 06.04.21

Entre le moment où nous ouvrons les yeux – le plus souvent au petit matin et sous nos couvertures – et celui où nous les fermons – le soir et sous les mêmes couvertures – où se situe notre foi ? La question peut sembler surprenante, mais y pensons-nous souvent ?

Il existe un débat féroce entre les philosophes à propos de la mémoire et de l'oubli. Le problème se présente ainsi :

Imaginons qu'un mari amoureux ait pensé vingt fois à sa femme au cours d'une journée spécifique. Quelle est la signification de ces vingt pensées ? Selon certains auteurs, plus le nombre de fois auquel le mari pense à sa femme est grand, plus cela prouve l'intensité de son amour à son égard. Cependant, d'autres auteurs arrivent à la conclusion exactement opposée : chaque pensée à propos de sa femme représente une prise de conscience importante de la part du mari, celle qu'il l'avait oubliée !

Dit autrement, penser à une personne – ou à quelque chose – peut révéler qu'immédiatement avant cette pensée, cette personne – ou cette chose – était sortie de notre esprit.

Des journées bien remplies

À quelle fréquence pensons-nous à D-ieu ? Dressons le tableau de Pierre, la personne moyenne qui est censée nous ressembler.

Vite levée pour ne pas être en retard au travail, Pierre passe tout de même par la synagogue pour y faire sa prière matinale. En cela, Pierre n'est pas particulièrement représentatif de ses compatriotes ; ceux-ci sont plus habitués à sauter du lit au métro, sans passer par l'étape spirituel du matin.

Arrivé au travail, Pierre se plonge avec plaisir dans ses tâches quotidiennes. Ses responsabilités représentent un défi constant pour son intelligence et ceci n'est pas fait pour lui déplaire. Au bureau, l'ambiance est plutôt joyeuse et les collègues de travail acceptent sans problème apparent la religion différente de notre sujet. En fait, tous ne se vantent-ils pas d'avoir pour meilleur ami un juif ?

L'heure du repas est la bienvenue. Chaque employé sort son sachet sandwich et les odeurs se mélangent sans égards aux différences de goût. Régulièrement, Pierre entend des réflexions gentilles du type : “Tiens, je ne savais pas que tu pouvais manger cela !” ; “Quoi, cela n'est pas kacher ? Mais il s'agit pourtant d'un produit naturel !” Etc.

Ainsi, l'heure du repas de midi représente le moment idéal pour transmettre quelques informations de base sur la kacheroute et les us et coutumes des juifs qui mangent kacher. Pierre ne se fait pas prier : il a l'impression que cela lui permet de créer des liens encore plus étroits avec collègue de travail.

La fin de journée arrive sans crier gare et tous se quittent en se souhaitant une bonne soirée et de se revoir le lendemain. Pierre ne rentre pas directement à son domicile. Plutôt, il se dirige vers le centre juif de son quartier. Au programme : une heure d'étude de Guémara. En fait, selon l'humeur du rabbin, cette heure peut être consacrée à des sujets divers dont l'objectif reste le même : renforcer la foi des personnes présentes.

Rentré chez lui à une heure avance de la soirée, Pierre apprécie pleinement l'accueil chaleureux de sa femme. Il se dépêche de raconter une histoire au plus jeune de ses enfants avant qu'il ne s'endorme et essaie – tant bien que mal – de se tenir au courant des évènements importants qu'on vécut sa fille et son autre fils.

L'horloge du salon affiche déjà une heure tardive et Pierre n'a plus que le temps de prendre une douche rapide avant de s'endormir en prononçant la prière du Chéma'. Après tout, n'est-il pas juif ?

Penser à D-ieu

Au-delà de chaque heure très occupée des journées de Pierre, pense-t-il à D-ieu ? Entre sa prière du matin et son étude du soir, quels sont les objets de ses pensées ? Pierre est juif et croyant ; à quelles occasions cela se fait-il remarquer ?

L'émouna (la foi) peut se vivre de deux façons différentes. Selon la première, nous revêtons nos habits de croyants-es lorsque nous prions, nous prononçons une bénédiction, nous célébrons une fête juive spécifique… Le reste du temps, nous “vivons”. Telle une éponge, nous prenons un nombre importants de valeurs du monde qui nous entoure (littérature, musique, façon de parler, de nous habiller…)… sans oublier aux moments venus que nous sommes juifs.

Selon la deuxième façon, notre émouna est ce qui nous distingue de notre entourage… à chaque instant. Certes, nous travaillons : il faut bien gagner notre vie. Cependant, malgré nos efforts pour entretenir des rapports amicaux avec nos compagnons de travail, notre cœur est dans notre étude (de la Guémara, des halakhoth…). Lorsque nous sommes “dans le monde”, notre esprit est ailleurs : dans la salle d'étude, en Eretz Israël (en Terre d'Israël), au commentaire récent que nous venons de lire à propos d'un texte saint…

Dit d'une façon à peine provocante, nous ne pensons pas à D-ieu, ne Le vivons. Si penser est réaliser que nous avions oublié, nous n'oublions pas D-ieu car nous vivons chaque instant de nos jours grâce à Lui. Nos habits de croyants ne nous quitte jamais, même si nous devons nous mêler aux autres.

Vivre D-ieu, c'est vouloir nous rapprocher de Lui, à chaque occasion, à chaque fois que cela est possible. Vivre D-ieu, c'est réduire à sa plus simple expression la différence entre la synagogue et notre environnement quotidien. Les deux espaces nous offrent un nombre infini de vivre notre judaïsme. Peu importe que nous ayons un livre de prières entre les mains ou… un téléphone qui nous apprend les plus récents cours de la bourse. Dans les deux cas, nous nous sentons proches de D-ieu car nous savons que nous faisons ce qu'Il attend de nous. Hachem est greffé à notre cerveau et rien ne pourra L'en faire partir.

Le datimeter

La personne ingénieuse pourrait inventer un appareil de mesure révolutionnaire : le Datimeter. En posant une cellule sensible sur notre poitrine, l'appareil indiquerait instantanément la mesure de nos pensées envers D-ieu. 50 ? Peut mieux faire ! La moitié du temps nous pensons à autre chose. 80 ? Bravo ! Vos pensées sont le plus souvent avec D-ieu. 100 ? Incroyable ! Vous n'avez plus aucun lien avec ce monde. Nous vous envions…

Grâce à D-ieu, le datimeter n'existe pas. Nous ne le supporterions certainement pas. Savoir avec précision notre valeur argus au marché de l'émouna pourrait s'avérer éprouvant pour un certain nombre d'entre nous.

De fait, les personnes qui cherchent réellement D-ieu dans les moindres occasions de leur vie savent que la mesure n'est jamais entièrement satisfaisante et que l'objectif consiste à l'améliorer chaque jour. Ces personnes sont celles qui réalisent qu'elles avaient oublié D-ieu lorsqu'elles y pensent.

Les autres personnes, celles qui revêtent leurs vêtements de croyants-es à intervalles réguliers, ne désirent pas un tel appareil de mesure. Mieux vaut croire – ou se faire croire – que nous pensons suffisamment à D-ieu. En fin de compte, ne portons pas sur nous le signe de l'alliance ? Ne percevons-nous pas le monde à travers notre vision de personne juive ? Etc.

Dans quelques jours, nous célèbrerons la fête de Pourim. Cette fête est celle de la victoire des juifs contre le monde non juif qui voulait les engloutir. Le mois prochain, nous célèbrerons Pessa'h (la Pâques juive). C'est à cette date que les juifs s'enfuirent d'Égypte. De la sorte, ils quittèrent une société et un monde de vie non juif afin de devenir un peuple distinct.

Notre volonté de faire de D-ieu nos vêtements de chaque instant, une véritable deuxième peau dépend de nous. Si nous revêtons le plus souvent notre casquette d'homme (ou de femme) de la société – qui se souvient régulièrement de son âme juive – nous avons déjà fait un grand pas pour notre survie.

Il nous suffit de savoir qu'il existe un niveau plus élevé, celui où D-ieu devient notre vie, notre souffle de vie. À ce niveau, la personne ne perçoit plus les évènements de la vie comme de simples signes anodins que les personnes de son entourage possèdent le pouvoir de modifier. Plutôt, tout devient message céleste. La personne réalise que le Maître du monde se sert de notre environnement pour nous faire parvenir Ses signes d'amour et qu'il nous suffit d'ouvrir les yeux – réellement – pour les percevoir.

Créateur du monde, aide-moi à me souvenir de Toi, jusqu'au point où je ne T'oublierai plus. Aide-moi à réaliser que je vis chaque heure, chaque minute et chaque seconde sous Ton aile protectrice. Ta bonté et tellement grande !

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