La Tora et l’humilité : un couple éternel – Béhar
Le mont Sinaï symbolise l’abaissement et l’humilité, et on peut apprendre de lui comment s’abaisser devant D-ieu et se conduire humblement, en sachant devant Qui on se tient.
La base de toute la Tora est l’humilité, que l’homme s’abaisse et s’efface devant l’Éternel dans tous ses actes, attitude évoquée par le verset “Que sommes-nous ?” (Exode 16:7-8). Quand il fait preuve d’une humilité absolue devant le Seigneur, c’est alors qu’il peut observer la totalité des mitswoth et atteindre la crainte de l’Éternel, ainsi qu’il est écrit : “La conséquence de l’humilité est la crainte du Ciel” (Proverbes 22:4).
Or on sait que l’humilité s’apprend du mont Sinaï, comme l’ont dit les Sages : “Pourquoi la Tora a-t-elle été donnée au mont Sinaï et non sur une autre montagne (ainsi qu’il est écrit : “Pourquoi jalousez-vous la montagne que D-ieu a désignée pour Sa résidence ?” (Psaumes 68:17)) ? Parce que le mont Sinaï s’est abaissé et a fait preuve d’humilité, c’est pourquoi la Tora a été donnée sur lui” (Sota 5a, Yalqout Chimoni Chemoth 284).
Cela rappelle les paroles de la Guémara : “Pourquoi la Tora a-t-elle été donnée dans le désert ? Pour que l’homme se rende disponible à tous comme le désert” (Nédarim 55a), et on apprend cette attitude du mont Sinaï.
Nous savons qu’il est dit de Moïse : “L’homme Moïse était le plus humble des hommes de la terre” (Nombres 13, 3). Il a appris cette humilité du mont Sinaï, et à ce propos les Sages nous disent : “Moïse a reçu la Tora du Sinaï” (Avoth 1:1), ce qui signifie qu’il l’a reçue à cause de l’humilité apprise du mont Sinaï, au point que dans son immense modestie il a encore dépassé celle de la montagne pour devenir véritablement le plus humble de tous les hommes de la terre. (Nous avons déjà évoqué cette idée en plusieurs endroits dans notre paracha et ce n’est pas ici le moment de s’étendre).
Nous devons faire un raisonnement a fortiori : si une montagne, faite de sable et de pierres et sans intelligence, peut arriver à l’humilité, à combien plus forte raison l’homme qui a l’intelligence et a été créé à l’image et à la ressemblance de D-ieu doit-il arriver à l’humilité et même surpasser celle du mont Sinaï, et combien plus encore un homme qui possède la Tora doit-il y parvenir !
Car les Sages ont dit : “Les paroles de Tora ont été comparées à l’eau, ainsi qu’il est dit : “L’eau désigne toujours la Tora” (Baba Kama 17a) et aussi : “De même que l’eau coule d’un endroit élevé vers un endroit plus bas, la Tora ne se maintient que chez celui qui s’efface et se conduit avec humilité” (Ta’anith 7a).
Dans la Tora, le sujet de l’humilité apparaît en plusieurs endroits. Ainsi, qu’y a-t-il pour nous de plus important que le Sanctuaire et le Temple, construits de bois et de pierre, et dont il est pourtant dit : “La gloire de l’Éternel remplit le Sanctuaire” (Exode 40, 34) ?
Ils incarnent l’idée que bien que la gloire de D-ieu remplisse toute la terre (voir Psaumes 72:19), ainsi qu’il est écrit : “Est-ce que Je ne remplis pas tout le ciel et toute la terre, parole de l’Éternel ?” (Jérémie 23, 24) et qu’aucun endroit n’est vide de Lui, ainsi que l’écrit longuement le Rambam dans les principes de la Tora, Il a tout de même choisi de résider uniquement dans une demeure de bois et de pierre.
Cette idée figure déjà en allusion dans le Midrach (Yalqout Chimoni Chemoth 365) selon lequel Moïse s’étonnait et tremblait, ne comprenant pas comment on peut construire un Temple à Dieu, alors qu’il est écrit : “Le ciel et les cieux du ciel ne peuvent Le contenir” (I Rois 8, 27), et moi, être humain, je vais lui construire un Temple ?
Alors, l’Éternel lui a répondu qu’Il voulait précisément demeurer parmi les benei Israël : “Je résiderai parmi eux.” L’homme doit lui aussi apprendre du Créateur à être rempli de la gloire de D-ieu et non de sa propre gloire, dans l’esprit de l’affirmation des Sages : “Quiconque poursuit les honneurs, les honneurs le fuient” (Tan’houma Vayiqra 3).
Quand la gloire de D-ieu emplit-elle l’homme ? Uniquement quand il sanctifie sa parole, ses actes et sa pensée, le tout dans un esprit d’humilité. C’est cela la volonté de D-ieu, et alors se réalise en lui le verset : “Faites-Moi un sanctuaire et Je résiderai parmi eux” (Exode 25, 8), en chacun d’entre eux.
L’homme doit aussi tirer la leçon des sacrifices qui sont offerts sur l’autel dans le Temple. En effet, tous les actes qui l’accompagnent doivent être accomplis dans un esprit de sacrifice de soi (la Guémara Bérakhoth 17a) dit à propos du jeûne que l’homme doit s’imaginer qu’il est lui-même sacrifié, que sa cendre est versée et son sang répandu sur l’autel. Alors il sera agréable à l’Éternel…). On apprend tout cela du bois, de la pierre et de la poussière dont est construit le Temple, et qui symbolisent l’humilité, puisque aucun des métaux qui symbolisent la guerre, l’orgueil et l’amour des honneurs ne doit être utilisé.
Tout cela va dans le même sens : l’homme doit se conduire avec une humilité totale et suivre la voie de Moïse qui a appris cette attitude du mont Sinaï. (…)
Les Sages affirment (Yalqout Chimoni Chemoth 283) qu’au moment du don de la Tora, le mont Sinaï a été enlevé de son emplacement primitif et suspendu au-dessus des benei Israël. Sur le verset “Ils se tinrent au bas de la montagne” (Exode 19, 17), la Guémara enseigne que le Saint béni soit-Il a renversé sur eux la montagne comme une cuve et leur a dit : “Si vous acceptez la Tora, tant mieux, sinon ce sera ici votre tombeau” (Chabath 88a).
Cela est difficile à comprendre. Pourquoi le Saint béni soit-Il a-t-Il dû arracher la montagne de sa place et la renverser sur eux comme une cuve, alors qu’Il aurait pu obtenir le même résultat de toute autre façon ?
On ne voit pas non plus pourquoi Il a dit aux benei Israël “Si vous acceptez la Tora, tant mieux” ? Craignait-Il donc qu’ils ne l’acceptent pas, alors qu’ils avaient déjà dit explicitement “Nous ferons et nous écouterons” (Exode 24, 7), ce qui montre qu’ils l’acceptaient sans aucune restriction ? Alors pourquoi rajouter cette condition ? Il faut encore comprendre pourquoi Il les a menacés que cela devienne leur tombeau.
Il aurait pu leur laisser craindre une mort ordinaire, ou une attaque des bêtes sauvages qui se trouvaient dans le désert. Est-ce uniquement cette menace de la montagne au-dessus d’eux et du châtiment de cette mort particulière qui a parue utile au Saint béni soit-Il ?
Essayons d’expliquer tout cela en accord avec ce que nous avons dit jusqu’à présent.
Le mont Sinaï symbolise l’abaissement et l’humilité, et on peut apprendre de lui comment s’abaisser devant D-ieu et se conduire humblement, en sachant devant Qui on se tient. Chacun peut en cela imiter Moïse. Mais il n’est pas facile d’arriver comme lui à apprendre d’une montagne qui n’entend pas, ne parle pas, et dont personne ne comprend la langue. Cela exige le niveau de Moïse notre maître, qui a vu avec la plus grande clarté possible ce qu’aucun autre être humain ni aucun autre prophète n’a vu (Yébamoth 49b).
Aucun autre n’est arrivé à apprendre l’humilité de la montagne, car ce n’est pas du tout une chose aisée. C’est pourquoi il n’est pas écrit : “Josué a reçu de Moïse” (dans Avoth ch. 1) mais “Il l’a transmise à Josué.”
Cela signifie qu’il ne lui était pas possible de recevoir de Moïse, car lui a dépassé ce qu’il avait reçu du mont Sinaï en s’élevant plus encore que cette montagne elle-même pour en arriver à son propre niveau : Moïse notre maître est le père de tous les prophètes (Vayiqra Raba 1, 15), il est allé plus loin que n’importe quel autre homme, car le mont Sinaï a dit : “Je suis petit”, et Moïse a dit “Que sommes-nous ?” (Exode 16, 7-8), ce qui montre qu’il avait dépassé la montagne.
C’est pourquoi il est écrit “Il l’a transmise à Josué, et Josué aux Anciens, et les Anciens aux prophètes” (Avoth 1, 1), ce qui signifie qu’ils ne l’ont pas reçue de Moïse – du mont Sinaï – mais que Moïse a transmis les voies de l’humilité à Josué pour que celui-ci apprenne comment arriver à cette humilité qu’il avait reçue du Sinaï, sans plus. Ensuite, Josué a transmis les voies de l’humilité aux Anciens et ainsi de suite, chacun selon ses capacités et pas davantage que le précédent, car ils ne pouvaient pas dépasser le mont Sinaï.
Nous comprenons maintenant parfaitement pourquoi la montagne a été suspendue au-dessus des benei Israël. C’est parce que l’homme doit apprendre les voies de l’humilité et de l’effacement du mont Sinaï, et lorsqu’il se départit de cette humilité devant Dieu et commence à s’enorgueillir, là se trouve son tombeau (c’est pourquoi l’expression utilisée est “là se trouve votre tombeau”).
C’est aussi pourquoi Il ne les a pas menacés d’un autre châtiment, comme les bêtes sauvages ou autre. En effet, l’orgueil et l’amour des honneurs chassent l’homme du monde (Avoth 4, 21), et même s’il s’agit d’un talmid ‘hakham qui étudie et affirme : “Nous ferons et nous écouterons”, lorsque son cœur s’élève et s’emplit d’orgueil, il se met à utiliser la Tora à son propre profit (Avoth 4, 7), ce qui est absolument interdit. À son propos, il est dit de lui “celui qui utilise la couronne disparaîtra” (Avoth 4, 7).
Il passe et disparaît du monde parce qu’il s’est enorgueilli, et alors, ici sera son tombeau ! Ainsi qu’il est écrit : “Ils se tinrent en bas de la montagne”, pour être encore moins que la montagne du Sinaï, pour s’élever dans l’humilité comme l’avait fait Moïse en disant : “Que sommes-nous ?” (“Véna’hnoumah”). “Mah” a la valeur numérique de “adam” (“homme”), ce qui signifie qu’il voulait dire : “Je ne suis même pas un homme, ni de la terre (adamah) !” C’est pourquoi le Saint béni soit-Il a utilisé précisément cette façon de dire à l’homme en allusion comment acquérir la Torah et les mitswoth : par l’humilité.
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