Ce qui sort du cœur
Quiconque ne prie pas afin de pouvoir prier, néglige sa prière et ne cherche qu’à s’en débarrasser, comme d’un lourd fardeau. Chacun doit donc beaucoup prier pour la prière...
De même que la prière peut maîtriser le mauvais penchant lorsqu’il prédomine, ainsi elle peut le contrecarrer lorsqu’il cherche à empêcher de prier. Selon la règle transmise par nos Sages de mémoire bénie : “Si le Saint béni soit-Il ne l’aidait pas, l’homme ne pourrait subjuguer son mauvais penchant.”
Par conséquent, l’homme qui veut mériter d’accomplir le précepte de la prière, a besoin de prier pour cela.
C’est ce que notre maître Yossef Caro écrit dans le Choul’han Aroukh (Ora’h ‘Haïm chap. 98) : “Les premiers piétistes(‘hassidim richonim) s’isolaient avant de prier, afin d’arriverà une parfaite concentration.” Une question se pose : Quellefut l’intention du Choul’han Aroukh en rapportant cetterègle ? Le Choul’han Aroukh est-il un ouvrage biographiquedécrivant les actions des justes ? On peut comprendre laprésence d’anecdotes et de moussar (éthique) dans un autregenre de livre, mais le Choul’han Aroukh est destiné à nousprésenter la loi, simplement et sèchement, pour nous guidersur notre conduite.
Mais il faut comprendre que l’intention de rabbi Yossef Caro z’l était d’enseigner la conduite suivante : on doit s’isoler avant la prière, afin de prier avec concentration.
Et tout s’explique maintenant à l’aide de nos derniers propos. Comme les efforts du mauvais penchant se concentrent essentiellement sur la prière (ainsi que l’enseignent nos Sages de mémoire bénie : “Quelle est cette chose sublime, mais négligée par l’homme ? C’est la prière”) l’homme doit donc prier au sujet de la prière, pendant au moins une demi-heure ; afin de prier comme il faut, sans dédaigner sa prière et sans vouloir s’en débarrasser au plus vite, comme d’un lourd fardeau.
On peut aussi le déduire d’un argument a fortiori : si les premiers piétistes qui étaient saints et purs avaient besoin de s’isoler une heure entière avant la prière afin de se concentrer comme il le faut, à plus forte raison nous autres dont l’esprit est faible et confus, nous devons au moins pendant dix minutes, demander à Hachem de prier comme il faut : intentionnellement, longuement, avec enthousiasme et dans l’union.
De plus, nous voyons d’ici avec quelle force le mauvais penchant attaque la prière, car même les saints devaient s’isoler avant la prière afin de prier comme il faut. Nous constatons en effet, que quiconque, petit ou grand, ne prie pas afin de pouvoir prier, néglige sa prière et ne cherche qu’à s’en débarrasser, comme d’un lourd fardeau. Chacun doit donc beaucoup prier pour la prière, car peut-être que cela l’aidera à ne pas la négliger. Comme on le voit, un mauvais penchant spécifique s’attaque à la prière, même à celle des justes, en les poussant à se presser et à s’en débarrasser dans l’impatience.
La Guemara enseigne donc d’une façon générale que les gens la négligent, sans différencier entre le juste et l’impie, car tous la négligent, parce qu’elle est la proie du mauvais penchant. C’est donc le seul précepte pour lequel il faille beaucoup prier journellement, pour l’accomplir comme il convient.
Si les anciens piétistes devaient ainsi méditer pendant une heure, orienter leurs pensées et se préparer à prier avec concentration, cela est encore plus vrai pour nous qui devons aussi beaucoup prier sur la prière ; et il serait souhaitable de nous conformer aux coutumes de ces hommes pieux, et nous isoler avant la prière pendant au moins une demi-heure.
Il suffit de se tenir juste une demi-heure devant Hachem et dire : “Maître du monde, Tu n’ignores pas qu’un mauvais penchant s’attaque à la prière et pousse l’homme à vouloir s’en dispenser. Aie pitié de moi et aide-moi à dominer ce mauvais penchant, afin de ne pas négliger ma prière et ne pas perdre l’occasion de m’unir à Toi, car l’essentiel de l’union et de l’attachement avec Toi s’opère grâce à elle.”
“Le mauvais penchant veut embrouiller mes pensées et lorsque je peux finalement m’attacher à Toi, il me pousse à finir ma prière au plus vite, tandis que je devrais continuer, afin de prolonger mon union avec Toi. En particulier lorsqu’on peut, grâce à elle, recevoir toutes les bénédictions du monde.”
Celui qui prie convenablement à chacune des trois prières de la journée, est assuré de recevoir une abondance infinie de bienfaits, dans les domaines spirituels et matériels. Il ne lui manquera rien, il recevra la subsistance, la santé, la paix domestique, la Tora, la foi, etc.
En fait, ce conseil est pertinent avant chaque prière, que ce soit la prière dans l’isolement, la lecture des Psaumes ou celle du Liqouté Tefiloth. Nous avons donc écrit qu’avant toute hitbodédouth il convient de consacrer quelques minutes pour prier sur l’hitbodédouth. Mais comme le mauvais penchant attaque essentiellement les trois prières fixes – où l’homme pénètre comme dans un songe, mi-somnolent, et récite les prières par coeur sans aucune intention, comme une leçon bien apprise – nous avons donc souligné l’importance de la préparation aux dix-huit bénédictions.
Pourtant, si l’homme voit que le mauvais penchant cherche à le troubler dans une toute autre prière, qu’il la néglige et cherche même à s’en débarrasser comme d’un fardeau, que D-ieu nous en préserve, il doit s’isoler et prier sur cette prière. Car pour ceux qui pratiquent régulièrement l’hitbodédouth, cette dernière risque de devenir elle aussi routinière et alors on ne cherchera plus qu’à s’acquitter de son obligation. Le même mauvais penchant s’attaque à celui qui lit régulièrement les Psaumes et le Liqouté Tefiloth.
Par conséquent, il n’existe d’autre conseil que de prier pour la prière, afin de prier avec concentration, ce qui est l’arme essentielle du Juif et sur quoi repose sa rédemption.
À suivre…
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