Ouvrir son cœur
Loin de remplacer les offices quotidiens, hitbodedouth viendra les préparer et les compléter. Par le fait que cette méditation doit se faire dans notre langue usuelle...
Improvisation
Maïmonide statue dans ses “Lois sur la prière” :
"L'essentiel de la prière consiste en ce que chacun dit avec son cœur." Lorsque les hommes de la Grande assemblée constatèrent que l'inspiration des cœurs allait en diminuant, ils fixèrent une forme invariable de prière: les “Dix-huit bénédictions” ou “'Amida”.
Dans ces courts textes, tous nos besoins sont exprimés. Une 'Amida dite avec recueillement et concentration réunit les quatre éléments fondamentaux de la prière :
– Louange,
– Recours à D-ieu,
– Supplication,
– Demande, recherche.
Il est rare de nos jours que les fidèles parviennent à ce stade et c'est pour palier à ce manque que Rabbi Na'hman a recommandé la méditation personnelle et spontanée nommée 'hitbodedouth (de la racine “boded ” qui signifie seul, isolé).
Loin de remplacer les offices quotidiens, hitbodedouth viendra les préparer et les compléter. Par le fait que cette méditation doit se faire dans notre langue usuelle, tous les aspects qui composent la prière y seront réunis, à la portée de notre cœur, puisqu'ils sont dits dans un langage que nous comprenons bien.
Pour ce qui est de la concentration, de l'intention, Rabbi Na'hman recommande de se limiter au simple sens des mots. Que nous priions en hébreu ou bien que nous le fassions dans notre langue maternelle, nous aurons à faire en sorte que notre esprit soit attaché au mot que nous prononçons, en réalisant sa signification simple.
Kabbale
Un fidèle demanda à Rabbi Na'hman :
“Quelle est la signification à avoir à l'esprit lorsque nous prononçons, en hébreu, le Nom Ineffable ?”
Rabbi Na'hman lui répondit :
“Havayé, le Nom Ineffable c'est D-ieu !”
Quant aux méditations kabbalistiques dites “kavanoth”, “yi'houdim ”, vu leur très haut niveau et les exigences qu'elles requièrent, seuls les initiés peuvent s'y employer, car à leur rang, ces intentions sont tout simplement le sens des mots !
Qui écoute la prière
Le fidèle qui observe les commandements de la Tora – ainsi que les paroles des Sages – répète trois fois par jour : "Béni Sois-Tu, Éternel, qui écoutes la Prière." (15ème bénédiction de la 'Amida)
Il n'aura pas le moindre doute que D-ieu l'écoute, aime et attend sa prière.
Quant à ceux qui n'auraient pas tant de conviction, ils pourraient en acquérir au moyen d'une simple réflexion: lorsque vous parlez (et donc lorsque vous priez) votre voix procède d'un mouvement d'air. Si l'on se demandait : "Qu'est-ce que l'air ?" On pourrait tout au plus obtenir pour réponse une vague définition physique qui nous laisserait sur notre question. Mais si l'on se demandait : "Qui est l'air ?" On serait amené à y penser de façon plus personnelle, bien plus vivante. C'est pourquoi les kabbalistes ont fractionné le nom de Éloqim, (celui par lequel tout se crée) en deux vocables : Mi Élé? – littéralement Qui (sont) Ceux–ci ? Cette question sera le début de la sagesse…
Et la réponse en découlera, bien évidente : l'air, comme tout le reste, c'est l'une des apparences du Divin, l'une des parures de Éloqim. Or, puisque cette apparence est indissociable de Son Essence, Il est absolument présent, conscient et agissant dans cet air, dans notre voix, dans chaque son, chaque soupir, chaque syllabe de notre parole. Dans ce cas, peut-on encore se demander s'Il "entend" ?
Petits détails
Prions pour la santé de notre âme, puis celle de notre corps qui en est le support. Ensuite, viennent tous nos besoins, ce qui nous permettra d'exprimer nos craintes et nos espoirs. Ne négligeons pas les plus petits détails de notre vie : demandons à notre Père jusqu'aux lacets pour nos chaussures.
Présence d'esprit
Avant d'accomplir une quelconque action – et à plus forte raison s'il s'agit d'un acte saint – il sera bon de se recueillir et de demander la force et l'intelligence nécessaire pour la mener à bien. Même pour la bienfaisance qui est l'un des plus grands commandements, il faut de grands mérites pour parvenir à l'accomplir idéalement. Ainsi donc s'explique la nécessité de demander.
Nous trouvons, dans certains livres de prières, des textes déjà rédigés en hébreu, qui précèdent l'accomplissement des préceptes. C'est dans cet esprit de préparation que ces prières ont été rédigées. Elles nous invitent à la présence d'esprit: à être pleinement conscients de l'action merveilleuse que nous nous apprêtons à faire. Elles ne se limitent nullement aux textes déjà établis mais invitent plutôt chaque fidèle à les imiter, à les adapter, à les vivre à sa façon.
Pas d'angoisse !
"Prenez avec vous des paroles et revenez vers D-ieu !" Ainsi parle le prophète.
La Guemara commente : "Je ne vous demande que des paroles !" Pas de jeûnes, pas d'ascèse, pas de mortifications et surtout pas d'angoisse : pour revenir vers D-ieu, il suffit de prendre des paroles et, un moment par jour, les adresser à D-ieu !
Profitons de cet encouragement formidable pour ouvrir une parenthèse importante. Toutes les idées exposées dans cet ouvrage ont pour but d'inspirer les lecteurs et les lectrices dans leur recherche spirituelle et personnelle et ceci, d'une manière résolument positive. Au moyen de ces thèmes, on pourra se revivifier, puis orienter sans peine les énergies de l'âme pour se mettre plaisamment à l'ouvrage. En cas de difficulté ou d'échec, on se souviendra que ces derniers sont les phases indispensables à la réussite. Ce n'est que de la marge mouvante qui oscille entre les hauts et les bas que naît enfin l'équilibre : la juste mesure !
Travail, tâche, besogne
"Ça je l'ai toujours fait ! Chaque fois que j'en ressens le besoin, je parle avec D-ieu !"
Il n'est pas rare d'entendre cette réplique et il faut vraiment féliciter les personnes qui s'adressent à leur Créateur dans leurs moments difficiles ou – au contraire – dans leurs périodes de bonheur. C'est un échelon très louable qui prouve une pureté de cœur, mais il y manque encore la force et la persévérance d'une méthode. Nous rendons-nous au travail uniquement lorsque nous en ressentons le besoin ou l'envie ?
En hébreu, la prière se nomme “'avoda” (travail, tâche, besogne) ; elle suit la règle de toutes les œuvres dont la régularité est la toute première loi.
Si nous voulons que notre ouvrage, notre moment de méditation ne soit pas uniquement un moment de confidence spontanée (ce qui est déjà très appréciable), mais, bien plus, qu'il amène à de réels progrès, il faudra se fixer un temps chaque jour et que ce temps soit considéré comme un rendez-vous, puisque s'en est un !
Pourquoi ne pas commencer par cinq petites minutes chaque jour ? Cela semble peu et c'est peu par rapport à l'idéal (Rabbi Na'hman demandait à ses disciples d'y employer au moins une heure !) mais avec un peu de courage, nous pouvons y parvenir. Cependant, si nous avons ressenti la juste valeur de cette méthode, nous admettrons que c'est bien là le minimum.
Commençons par cinq minutes chaque jour. Par la suite, nous pourrons, peu à peu, augmenter ce temps et, le Chabath par exemple, y consacrer un plus long moment. Si nous retombons entre-temps et que nous perdons ces cinq précieuses minutes, il ne faudra pas s'en offusquer, ni même être surpris : il faudra simplement recommencer, dès que l'on s'en rendra compte, ainsi qu'il est dit : "Par sept fois le juste s'affale et se relève."
Le Juste n'est pas celui qui ne tombe pas, tout le monde tombe. Le juste est celui qui se relève !
Quand on sera "retombé" mille fois et que l'on se sera relevé, on verra ces cinq minutes du début grandir et prospérer et l'on pourra appliquer à soi-même le merveilleux adage : "Qu'elle est belle cette heure de repentir et de bonnes actions dans ce monde : plus belle que toute la vie au paradis !" (Avoth IV,22)
A suivre…
Extrait du livre “La porte du ciel – Hitbodédouth ” par Rabbi Yits'haq Besançon. Reproduit avec l'aimable autorisation des Éditions du chant nouveau.
Ecrivez-nous ce que vous pensez!
Merci pour votre réponse!
Le commentaire sera publié après approbation