Le bénéfice du doute
Selon Rabbi Na'hman, en jugeant une personne mauvaise d'une façon favorable, nous déclenchons un processus qui lui permettra de se repentir...
Selon Rabbi Na'hman de Breslev, en jugeant une personne mauvaise d'une façon favorable – c'est à dire, en lui accordant le bénéfice du doute – nous déclenchons un processus qui lui permettra en fin de compte de se repentir.
Yom Kipour – Le bénéfice du doute
“Nous avons dit du mal !” (“Dibarnou dofi ”, prière de “Vidouï ”-Confession” prononcée à plusieurs reprises pendant le service de Yom Kipour).
La Tora nous commande de juger nos compatriotes humains d'une façon équitable ; en d'autres termes, nous devons juger nos confrères en leur accordant le bénéfice du doute. C'est ce qu'indique le verset : “Ne vas point colportant le mal parmi les tiens” (Lévitique 19 : 16). Ainsi, si nous constatons que notre voisin possède des qualités et des défauts, nous devons éviter de parler de ses défauts. Plutôt, nous devons nous concentrer sur ses qualités ; nous devrions même chercher les aspects positifs parmi ses défauts.
Selon Rabbi Na'hman de Breslev (Liqouté Moharan I 282), en jugeant une personne mauvaise d'une façon favorable – c'est à dire en lui accordant le bénéfice du doute – nous déclenchons un processus qui lui permettra en fin de compte de se repentir.
Le conseil de Rabbi Na'hman est-il réellement applicable ?
Le jour de Yom Kipour, nous avouons “dibarnou dofi ”, c'est à dire que nous avons mal parlé à propos de nos semblables, les humains. À première vue, quelque chose semble problématique avec cette confession particulière. Qu'arrive-t-il si ce que nous avons dit est entièrement vrai ? De fait, que sommes-nous censés dire lorsque nous voyons une personne faire quelque chose qu'elle ne devrait pas faire, comme – que D-ieu nous préserve – transgresser les lois de la Tora ? Sommes-nous censés mentir à Yom Kipour dans le but de leur permettre de se repentir ?
Avec l'aide de D-ieu, nous répondrons à cette question à l'aide d'une parabole :
Deux fois par an, une foire régionale avait lieu dans la ville de Berditchev. Pour un petit marchand ambulant d'un des nombreux petits villages avoisinants, le coût du déplacement ne valait pas la peine. Conséquemment, les petits marchands ambulants et colporteurs de la région avaient l'habitude de payer une commission aux gros marchands qui allaient à la foire pour acheter leur marchandise en grande quantité, afin que ces derniers leur ramènent de la foire la marchandise dont ils avaient besoin.
Ya'aqov était marchand ambulant. Il vendait des chiffons, des guenilles et autres torchons à un prix qui défiait toute concurrence. Le grincement de son vieux wagon et la bâche grise qui le recouvrait étaient connus de tous les villageois de la région. Grâce à la compassion infinie d'Hachem, son commerce était florissant. De fait, pendant l'année qui venait de s'écouler, Ya'aqov avait vendu presque la totalité de son stock et il avait désespérément besoin de refaire son stock afin de démarrer la nouvelle saison. Il approcha Goldman, le grossiste en tissus et il lui demanda d'acheter pour lui à la foire de Berditchev, deux rouleaux entiers de tissu en laine polonaise. La commission qu'il devait payer au grossiste pour que celui-ci lui rende ce service était très importante, mais elle ne représentait tout de même qu'un dixième du coût du voyage. Ainsi, Goldman et Ya'aqov étaient ravis de faire affaire ensemble.
“Cependant” remarqua Goldman, “il serait peut-être préférable d'acheter de la laine hongroise : elle est moins chère que la laine polonaise, et elle est plus résistante. La laine polonaise s'use très vite et elle perd de sa couleur dès le premier lavage…”
“Peu importe” répondit Ya'aqov. “Voici deux cents roubles, plus 20 roubles pour les 10% de ta commission. Rapporte-moi exactement ce que je désire – de la laine polonaise – et rien d'autre !” insista Ya'aqov.
À la foire, Goldman alla directement chez Taikovsky, le plus grand importateur et exportateur de tissus de la région. Parmi la liste des articles que Goldman acheta, se trouvaient les deux rouleaux de laine polonaise pour Ya'aqov.
“Goldman, tu m'étonnes énormément” dit Taikovsky. “La laine polonaise est chère et elle ne justifie pas son prix. Elle s'use vite, elle devient terne rapidement et elle se déchire facilement. Pour quelle raison n'achètes-tu pas ta laine hongroise habituelle : son coût est 20% inférieur et sa qualité le double !”
“J'ai accepté une commission pour acheter à mon client exactement ce qu'il désire” rétorqua Goldman.
Taikovsky sourit d'un air narquois. “Tu veux dire que tu vends en pleine connaissance de cause de la mauvaise qualité en échange d'une commission ?”
“Aux yeux de mon client, cela n'est pas de la mauvaise qualité,” répondit Goldman, “c'est exactement ce qu'il désire et c'est exactement ce que je lui ramènerai !”
* * *
Ya'aqov désirait que Goldman lui ramène de la laine polonaise. De la même façon, Hachem désire que nous arrivions à juger favorablement, même une personne mauvaise. Même si le “tissu” – la mauvaise personne – semble de mauvaise qualité, un jugement favorable et le bénéfice du doute sont exactement ce que nous ordonne la Tora. Pour cette raison, nous sommes obligés de délivrer la marchandise qu'on attend de nous.
Selon Rabbi Na'hman de Breslev, en trouvant un aspect positif chez une personne mauvaise, celle-ci est élevée spirituellement et elle est amenée à faire techouva (se repentir). Lorsqu'une mauvaise personne devient “ba'al techouva” (nouvellement religieuse), le monde entier devient un endroit meilleur. Lorsque nous aidons le monde à devenir une place meilleure, nous obtenons tous – le jour de Yom Kipour – l'expiation complète de la totalité de nos mauvaises actions. De fait, lorsque nous jugeons d'une façon favorable et clémente les autres personnes, Hachem nous juge de la même façon. Nous avons donc tous intérêt à accorder le bénéfice du doute aux autres.
Puisse Hachem nous inscrire – ainsi que tout Israël – dans le livre de la vie, pour une année 5768 (2007/2008) de joie et de santé. Amen.